02/01/2012 - 03/01/2012 | DemysTEAfication

29 février 2012

Terre de Chine

thés terre de chine

Impossible de ne pas voir ce comptoir situé à moins de 200 mètres du Centre Pompidou, pour deux raisons peut être : sa façade peinte en rouge et le fait qu'il soit dans une ruelle que l'on trouvera relativement peu fréquentée, après avoir affronté l'agitation qui règne sur le parvis et aux alentours immédiats du musée consacré à l'art contemporain.

Coincée entre une boutique de lingerie "osée" et un "Spa", le comptoir, situé au 49 de la rue Quincampoix, possède son site internet, servant à la fois de présentation de l'activité, de formulaire de contact, mais surtout de boutique en ligne.

La décoration de la boutique elle-même est faite de meubles chinois plus ou moins anciens suivant les pièces, mais toujours d'une grande beauté, et le style entre comme en écho avec les ustensiles mis en présentation un peu partout à travers la salle. Deux espaces se distinguent, un espace de dégustation - salon de thé et le comptoir de vente de thé proprement dit. Le tout est séparé par une grande étagère servant de présentoir à des ustensiles divers pour le thé.

boutique terre de chine

La compétence ne fait pas de doute, et l'accueil est toujours excellent. La très grande majorité des fois où je me suis rendu sur place, une tasse de thé, infusé dans la seconde sur le large plateau à thé au bout du comptoir, m'a été offerte pendant que je faisais mes sélections, ainsi qu'à tous ceux qui se trouvaient dans la boutique, en attente pour commander ou comme simples badauds.

Le comptoir fourni de petites quantités si on le souhaite, la grande majorité des références étant disponible à une quantité minimale de 50 grammes, voire 25 grammes pour certains thés.

Sur le plan des céramiques, vous trouverez ici du matériel de base, des théières Yixing "milieu de gamme" et quelques théières Yixing "haut de gamme". A noter, le comptoir propose aussi des solutions de stockage comme des pots à thés divers en porcelaine et en terre de Yixing, mais aussi, de grandes jarres en terre de Yixing pour stocker une petite quantité de galettes de Pu Erh entières.

Une grande humilité règne ici, ainsi qu'une certaine décontraction que je ne ressens pas dans d'autres comptoirs. De plus, jamais on ne m'a servi de discours  sur la supériorité de leur carte sur celle des autres, chose hautement appréciable s'il en est. C'est donc toujours avec plaisir que je me rends dans cette Maison, où il est toujours facile d'apprendre quelque chose et de faire des découvertes.

28 février 2012

La Chambre de Thé ou Chashitsu

zen

Voici un schéma simplifié d'une chambre de thé de type Yojohan ( 4 tatamis et demi ), réalisé à partir de schémas partiels, de livres du XIXème siècle ( incroyablement plus complets et simples que ceux que l'on peut trouver actuellement sur le sujet, tel Japanese homes and their surroundings par Edward S. Morse, qui date de 1885 ) et de nombreuses photographies.
Chambre de thé ou pavillon de thé

Il y a tout d'abord deux pièces aux fonctions séparées qui forment le pavillon de thé : la chambre de thé proprement dite et le Mizuya, qui sert à ranger, à laver et à préparer les ustensiles destinés à la cérémonie du thé.

L'organisation dans la chambre de thé est ensuite la suivante :

A : l'hôte menant la cérémonie ( Teishu )
B : l'invité le plus important ( appelé Shokyaku ), sur un tatami à part
C : le second invité le plus important ( appelé Jikyaku )
D et E : les autres invités sur le tatami des invités suivant leur ordre d'importance ( tous appelés Kyaku )
F : l'invité le moins important sur le tatami de l'entrée ( appelé Tsume )

Cinq personnes au plus participent comme invités à la cérémonie, et chacun s'installe donc suivant son rang, indiqué par le maître de cérémonie. En outre, chacun rentre par une porte qui lui est propre : l'hôte entre par le Sadouguchi, porte de taille normale, et prend place sur un tatami où il est le seul à sièger, appelé Temaeza. Les invités entrent par une entrée de petite taille ( Nijiriguchi ) les obligeant à se baisser, à entrer et à se déplacer dans le chashitsu accroupis.

Enfin, l'organisation formelle ne s'arrête pas aux personnes et au lieu, et les ustensiles de la cérémonie eux-mêmes ont leur place propre :

1 : Mizusashi ( pot à eau froide )
2 : Chaire ou Natsume ( contenant le thé en poudre ) avec chashaku posée dessus
3 : Chasen ( fouet à thé )
4 : Chawan ( bol à thé )
5 : Futaoki ( ustensile pour poser le couvercle du Kama, appelé Futa, ou la louche en bambou faite pour puiser l'eau chaude, appelée Hishaku )
6 : le Ro ( foyer enterré ) sur lequel on place le Kama ( bouilloire ) aussi appelé Chanoyugama
7 : Kensui ( pot à eaux usées ou pot poubelle )

Chashitsu

26 février 2012

Long Jing 3ème grade " Terre de Chine "

long jing troisième grade

Encore un Long Jing ? Oui et non, chaque thé étant différent même si ici, il est de la même sorte que le précédent. Ainsi, si je ne pense pas que la comparaison de deux thés de sortes différentes, comme entre un Pu Erh Shu et un Thé blanc par exemple, soit utile, la comparaison entre deux thés de la même sorte, de grade équivalent ou de grade différent, par contre, est pour moi très instructive.

Là encore, il s'agit d'un Long Jing du comptoir Terre de Chine, récolté en avril 2011 et mis en vente au tarif de 10 € les 100 grammes. Pourquoi une telle différence de prix par rapport au premier grade ? Si l'on peux s'interroger en voyant le tarif papier du comptoir, l'ouverture du paquet nous donne immédiatement quelques indices ... 

Tout d'abord, l'ouverture du paquet ne laisse pas la place à un assaut de votre nez par une multitude de parfums, c'est le moins que l'on puisse dire. Dans son état sec, une faible odeur de noisette vient au nez, accompagnée par l'herbe sèche. Les feuilles sont plus foncées que celles du premier grade et de nettes différences de teintes entre les différentes feuilles, qui sont aussi plus irrégulières en taille. Il y a également plus de petits morceaux brisés. 

La liqueur est assez inexpressive au nez, avec surtout une note herbacée. La couleur de la liqueur, elle, est nettement plus foncée que celle du premier grade, beaucoup plus jaune aussi.

terre de chine

En bouche, c'est également moins riche que pour le premier grade, et sensiblement différent : les algues sont très présentes, accompagnées d'une note beurrée et, dans cette continuité, la liqueur est aussi plus "grasse".

L'infusion montre des morceaux de feuilles plus ou moins grands, des brindilles et quelques bourgeons avec deux feuilles. Mais dans l'ensemble, ce sont surtout des feuilles de taille moyenne, par paire, plus ou moins roulées sur elles et souvent en partie brisées. La cueillette est également visiblement moins fine que pour le premier grade.

terre de chine

terre de chine

thé vert

Au final, même si ce thé n'est pas désagréable, il n'est largement pas à la hauteur de son "frère" du même comptoir. De la même façon, la différence de prix par rapport au premier grade se comprend aisément pour peu que l'on goûte les deux crus ... la qualité se paie toujours, il est presque illusoire de croire le contraire ...

25 février 2012

Long Jing 1er grade " Terre de Chine "


terre de chine

Voilà un thé que je bois depuis quelques temps déjà. Ce Long Jing 1er grade a été cueilli en avril 2011. Il est en vente au comptoir Terre de Chine pour 30 € les 100 grammes.

Ce thé est excellent dès le départ, et l'ouverture du paquet à elle seule embaume : note de verdure,de noisette sèche, de fleurs et une toute petite pointe d'iode, très lointaine et une petite odeur de grillé, plus présente. Le moins que l'on puisse dire, c'est que cela est prometteur.

La liqueur est assez pâle, avec des reflets verts. Au nez, viennent les épinards et les algues mais surtout les légumes verts, tels les haricots.

terre de chine

En bouche, on n'est pas déçu, c'est le moins que je puisse dire. Viennent tout d'abord les algues et l'air marin, sans aucune astringence ni aucune amertume, qui se transforment en légumes verts, puis vient la verdure, l'herbe coupée et une petite longueur douce et légèrement fleurie, à la limite du sucré.

L'infusion, elle, est de bonne qualité des feuilles bien entières, assez petites et presque pas de brisures. La cueillette a été visiblement assez fine composée du bourgeon et d'une feuille ou du bourgeon et deux feuilles. Il y a quelques feuilles seules éparses, encore roulées sur elles-mêmes et qui sont marquées de plis comme les feuilles nouvelles à la sortie du bourgeonnement qui ne se sont pas encore totalement épanouies.

thé vert chinois

terre de chine

Un bon Long Jing donc, excellent de bout en bout, d'une très belle composition et, ce qui compte le plus après tout, qui "produit" une excellente liqueur et qui mérite largement son prix, peu onéreux au vu de la qualité proposée.

Forums du thé ou la traversée du désert

Voici trois forums consacrés au thé, ce sont les seuls vraiment dédiés au thé que j'ai réussi à trouver :

Teachat : en anglais, mais visiblement le plus actif !

Les deux suivants sont en français, et sont quasi morts si pas moribonds :

L'art du thé : le plus actif des forums en français ( et c'est presque désert ) et peut être le plus ancien désormais !

Le cercle du thé ( http://www.webdonline.com/fr/services/forums/forums.asp?id=394561 ) : actif il y a longtemps, à son lancement, mais plus trop maintenant ... en fait, il est désormais disparu ...

Il y en avait encore un il y a quelques années, intitulé discuthe.fr mais il semble vraiment mort celui-ci ... c'est bien dommage ...

Et un petit dernier de dernière minute, consothé, qui "vient" de naître, puisqu'il compte, il me semble, 4 utilisateurs inscrits à l'heure où je vous parle ... allez, il y en a un cinquième maintenant ! Longue vie à ce forum je l'espère.

Je sais, c'est bien court comme article, c'est vite fait, çà ne coûte pas cher en lignes de codes html ... tsss, je me moque vraiment du lecteur ... allez, une petite photographie pour me faire pardonner et pour étoffer un peu cet article ( en même temps, avec un sujet sur le désert, il fallait s'y attendre ) ...

forum sur le thé

24 février 2012

Un autre endroit idyllique ...

pont japonais

Le jardin Albert Kahn, situé à Boulogne-Billancourt, au 10 - 14 de la rue du Port, est, là encore, un de ces endroit surprenant, du moins la première fois que l'on s'y rend. Il est, par ailleurs, relativement aisé de s'y rendre, et on y entre par un bâtiment moderne qui sert de musée et d'espace d'exposition.

Après s'être acquitté du modique droit d'entrée ( à l'heure actuelle, entre 2,50 € et 3 € suivant qu'il y ait ou pas une exposition en cours ), on passe la sortie de l'espace d'exposition pour tomber presque nez à nez avec un "village" japonais "caché" au milieu de la verdure savamment organisée.

lanterne japonaise

Les bâtiment font un peu "vieillots" et sont ou vont être restaurés, il me semble. Mais cela n'enlève rien à leur charme, au contraire, leur donnant un aspect un peu plus authentique, plus "retiré du monde". Un petit pavillon de thé est en activité suivant les saisons.

jardin albert kahn

jardin albert kahn

jardin albert kahn

De belles lanternes japonaise anciennes jalonnent également le paysage, deci delà, chacune dans un style différent des autres, accentuant l'impression d'être hors du monde.

jardin albert kahn

Le parc possède bien sûr des espaces plus "courants" ( "jardin anglais", "jardin français", "forêt vosgienne", ... ) qui valent le déplacement eux aussi, mais sont, de mon point de vue, en-dessous de la qualité du jardin japonais, même si, il faut l'avouer, ce doit être un plaisir que d'occuper le petit hôtel particulier, ancienne maison d'Albert Kahn, située dans la "forêt bleue". Le jardin japonais est en effet surprenant à bien des égards, non pas par sa seule étendue, mais par la succession des tableaux qu'il propose.

jardin albert kahn

jardin japonais

Chaque vue et chaque angle de vue offre un tableau à la fois immobile et en mouvement, toujours hors du temps grâce à des rideaux végétaux disposés avec science.

rideaux végétaux

pin japonais

jardin albert kahn

Tout enchante le regard et certains grands arbres semblent façonnés tels des bonsaïs. Les jeux de lumières ne sont pas en reste, et des trouées dans la verdure laissent apparaître comme des joyaux.

jardin albert kahn

Chaque détail végétal est très soigné, mais le jardin japonais est aussi un jardin de pierre et d'eau, et un regard sur l'immense bassin où s'égayent des carpes koï vient ponctuer une riche visite.

cascade japonaise

Je ne peux enfin que dire que toutes les photographies, aussi nombreuses soient elles, ne remplaçeront jamais une visite sur place, tant il y a à voir, et je ne peux que vous encourager à aller admirer l'endroit par vous mêmes ...

jardin albert kahn

Tuocha " Yunnan Tuocha " 2009


tuo cha

Chose promise, chose due ! J'avais promis de boire les pires lavasses, je commence donc par celle-ci. Tout le monde connait la version en sachet aromatisé ou non de cette chose :
thé tuocha
Photographie © Yunnan Tuocha
On le trouve aisément un peu partout, au prix moyen constaté de 9 € le Tuocha de 100 grammes. J'ai trouvé le mien en 2009 chez Tang Frères, 48 rue d'Ivry à Paris, mais en cherchant bien, vous le trouverez aussi au rayon "diététique" de votre supermarché habituel, pour peu que le-dit supermarché ne soit pas trop petit. Je n'en avais goûté alors qu'un petit morceau, puis l'avais mis de côté parce que je le trouvais trop dur à casser, pour finir par l'oublier au fond d'une jarre, hors de son carton.

tuocha

tuocha

Autant le dire tout de suite, le nid est dur comme du bois quasi pétrifié et il faut appuyer bien fort sur le pic avec un mouvement de rotation pour qu'il s'enfonce de quelques millimètres ( au passage, bien faire attention de ne pas s'enfoncer le pic dans la main ). Je sais que les thés sous forme de tuocha sont très compressés, mais là, on atteint des sommets ! A force de patience et d'endurance, on arrive a en détacher des morceaux bien compacts.

Sous sa forme sèche, il se dégage une odeur de poisson. Après un premier rinçage, c'est la vieille cave qui vient nous voir. Tout étant resté compact, un deuxième rinçage est nécessaire et là, c'est une odeur de carton qui domine tout d'abord, puis cela sent enfin le Pu Erh cuit, mais brûlé.

Au nez, la liqueur est assez inexpressive, mais des effluves de caramel brûlé se dégagent toutefois.

tuocha

La liqueur est très sombre, d'un brun très profond, tirant sur le noir. En bouche, un goût de Pu Erh cuit, insistant sur la terre, avec une longueur de champignons de Paris, mais toujours avec une note persistante de carton ondulé. Au fil de dix infusions, la terre s'estompe peu à peu, laissant les champignons blancs prendre l'ascendance, mais sans disparition du carton.

L'infusion quant à elle n'est pas très belle à voir, car elle est composée de morceaux de tiges de tailles diverses, de brisures fines de feuilles et de morceaux de feuilles un peu plus grandes ... rien d'étonnant quand on repense à la façon dont ce tuocha était compressé.

tuocha

En conclusions : 
  • un mauvais Pu Erh, même un peu vieilli, restera un mauvais Pu Erh.
  • il faut aussi goûter des lavasses pour avoir des points de comparaison
  • la marque en question semble revendre différents tuocha de divers producteurs sous la même boite générique de sa marque, car il semble que d'autres ont eu une expérience plus positive avec ce qui semble être un thé de la même marque ... en gros, acheter un tel tuocha serait un peu comme jouer à la loterie ... quoi qu'il en soit, j'ai perdu, pas de doute ...

23 février 2012

Tai Ping Hou Kui " Terre de Chine "


terre de chine

Voilà un thé surprenant à bien des égards, et la taille de ses feuilles n'est pas la moindre des surprises qu'il apporte. Les feuilles de ce thé semblent en effet démesurées et comme marquées par endroits si elles sont observées de près. Cela est dû à l'étape de pressage manuel sur des claies. Il résulte de la longue manufacturation de ce thé des feuilles tout aussi longues, puisque, dans le présent "échantillon", récolté en avril 2011, chaque brin fait entre 8 et 10 cm :

terre de chine

terre de chine

Les Tai Ping Hou Kui de bonne qualité présentent des feuilles entières et pointues. En outre,  les brins doivent être composés du bourgeons et de deux feuilles, feuilles et bourgeons étant presque de la même taille. Tout cela est bien le cas avec ce thé provenant du comptoir Terre de Chine, où il est vendu au prix de 42 € / 100 grammes.

Il est assez incommode de faire rentrer les feuilles dans la théière, du moins si on ne cherche pas à les casser. Cependant, l'opération se fait sans trop de casse, si l'on veux bien prendre le temps nécessaire à sa réalisation. Chaque brin, bien qu'il soit sec, garde en effet une certaine souplesse due à son pressage.

Ce thé dégage, sec, une odeur complexe où se mêlent les algues, l'air marin, l'iode, la verdure et l'herbe coupée en train de sécher.

La liqueur, elle, est d'un jaune très clair et dégage une odeur d'herbe et de feuilles vertes.

Tai Ping Hou Kui

En bouche, c'est l'arrivée immédiate de l'herbe coupée, des épinards puis des algues mais sans qu'il y ait réellement l'aspect iodé qui accompagne en général cette sensation. Le tout reste très léger et tout aussi complexe que son odeur sèche le laisser présager.

L'infusion présente des feuilles bien entières et même restées en brin pour la plupart. La longue manufacturation de ce thé apparaît encore ici, et il est fréquent de voir la base d'une feuille restée ronde rattachée à un rameau totalement aplati.

thé vert chinois

terre de chine

thé vert

Un thé hors normes donc, extrêmement complexe à bien des égards, mais qui devrait être infusé dans une théière aux formes spécifiques : assez fine et faite en hauteur pour pouvoir y insérer les feuilles de tout leur long.

22 février 2012

Le style de Bizen

bizen yaki

Bizen se situe dans la région de Chugoku, préfecture de Okayama, et le principal centre de production de la céramique de style Bizen se trouve dans la bourgade proche, Inbe. S'il y a bien un style de céramique japonaise qui, à mes yeux, incarne formellement l'esprit du Wabi-sabi, c'est bien celui de Bizen. Ici, la "couverte accidentelle" règne en maître, le rêche, l'âpre, l'aspect brut du grès dominent sans partage.

La cuisson traditionnelle se fait aux alentours de 1250 ° Celsius. Elle se fait avec du bois de pin et dure de 10 à 15 jours, toujours pour les fours traditionnels, temps pendant lequel il faut bien sûr alimenter manuellement le four et qui entraine une grosse consommation de bois.

Comme toujours, tout paraît simple dans le grès japonais, mais rien ne l'est en vérité, et il y a plusieurs genres dans le style Bizen, et parfois plusieurs genres s'expriment sur une même pièce ...

Tout d'abord, il y a le Hidasuki :

hidasuki

bizen

Le hidasuki ou "corde de feu" est certainement le genre le plus récent, puisqu'il nécessite une cuisson en four à gaz pour conserver cet aspect clair. L'objet est d'abord entouré de cordes de paille de riz puis mis à cuir dans un four moderne, ce qui cuit l'argile sans permettre aux retombées de cendre de la marquer. Les cordes, elles, brûlent et créent une couverte aux endroits où elles passaient.

Il y a ensuite le Botamochi :

botamochi

Il s'agit plus d'une technique que d'un genre à proprement parler : un "dessin" est créé en posant un morceau ou des morceaux de céramique réfractaire sur ou à proximité d'une pièce de plus grande taille lors de la cuisson, ce qui empêche les retombées de cendres à ces endroits. On place également parfois des pièces céramiques sur d'autres pièces plus grandes ce qui va créer d'autres types de variations de couleurs, genre que l'on nomme alors Fuseyaki. Le genre Goma, en particulier, se retrouve également sur les pièces du genre Botomachi, bien que dans la photographie ci-dessus, nous ayons un Botomachi sur un Sangiri partiel suite à enterrement d'une partie de la pièce dans la cendre.

Le Goma est lui le résultat de retombées de cendres de bois de pin, créant une couverte relativement épaisse par endroits seulement :

chawan

bol a the bizen

goma

Il s'agit d'un genre relativement répandu, car très simple, cette couverte étant à l'origine une couverte accidentelle. Le résultat est une couverte, partielle ou non suivant la pièce, assez jaune tirant sur le brun avec parfois des points plus sombres, presque noirs, parfois semblables à des grains de sésame que l'on aurait projetés sur la partie de la pièce la plus exposée aux retombées de cendres. Parfois les retombées de cendres sont si nombreuses qu'elles produisent des effets de coulures et prennent le nom de "Tamadare". Suivant les effets et le mélange des diverses techniques exposées ici, on nomme aussi Kasegoma le type de couverte lorsque celle-ci se pare de tons dans la gamme des verts.

Le AoBizen ou "Bizen bleu" est un genre obtenu par la combinaison d'une cuisson en réduction ( cuisson pauvre en oxygène ) et d'une cuisson à proximité de la flamme ( ce qui va entrainer une atmosphère pauvre en oxygène et majoritairement saturée en dioxyde de carbone ). Inutile de dire que la maîtrise doit être grande et que la casse au sein du four doit être importante. Cela donne une couverte aux tons dominés par le gris, les nuances allant de gris très profonds avec des reflets bleus à des gris clairs relativement pâles.

bizen

Enfin, le genre Sangiri, en particulier comme ci-dessus, combine plusieurs effets dont le Aobizen, mais de façon plus complexe, car les pièces sont partiellement et imparfaitement recouvertes d'une épaisse couche de cendre lors de la cuisson, mais aussi par d'autres pièces cuites en même temps, ce qui crée des effets innombrables de couleurs dues aux différences de températures de cuisson ainsi obtenues et à la cuisson également ainsi obtenue de certaines parties seulement en réduction, ce qui donne des effets allant du noir aux effets de lignes irisées quasi invisibles données à l'argile cuite sans couverte de retombée.

sangiri

Bien conscient que tout cela est peut être abrupt au premier abord, je résumerai pour faciliter une éventuelle consultation :

- Hidasuki : des cordes de riz sont attachées autour de la pièce, par ailleurs protégée des retombées de cendres ( et donc produite avant tout dans des fours modernes avec une cuisson au gaz ou à l'électricité ). En brûlant, les cordes vont marquer la pièce de céramique.

- Goma : les retombées de cendres de pin créent une couverte où dominent des petits points semblables à des grains de sésame.

- Kasegoma : la couverte se forme de la même manière que pour le gomma mais donne des couleurs allant vers des tons verts plus ou moins profonds.

- Botomachi : une "tache" de couleur claire, c'est-à-dire plus claire que le reste de la couverte majoritaire de la pièce, est formée par l'application, pendant la durée de la cuisson, d'une pièce de terre réfractaire sur la partie qui sera plus claire à la fin de la cuisson.

- Fuseyaki : technique proche de la précédente, qui donnera donc généralement le même résultat, et qui consiste à poser une pièce plus petit sur une autre plus grande.

- Aobizen : effet d'une cuisson en réduction produisant toute une gamme de gris sur l'ensemble de la pièce.

- Sangiri : effet produit par la cuisson d'une partie seulement de la pièce en réduction du fait d'un enfouissement partiel de la pièce dans la cendre.

bol à thé japonais bizen

Ce dernier type est sans conteste le plus répandu avec le genre Goma et le genre Hidasuki. Les genres Botomachi et Fuseyaki quant à eux se rencontrent généralement que sur de grandes pièces comme les plats ou sur les Tokkuri. Mais de façon globale, les pièces présentent presque toujours le résultat d'un ou deux techniques, effet volontaire ou non. Le genre Hidasuki est relativement décrié par certains,  comme Robert Yellin, qui le range dans la catégorie de ce qu'il appelle le "plastic bizen" ou "Bizen de plastique", à savoir des pièces tournées et cuites en grande quantité dans des fours modernes fonctionnant au gaz de piètre qualité selon lui. Il est vrai que 99% des pièces de type Hidasuki sont très généralement exécutées à la chaine, sans recherche particulière de modelage, de création ou d'effet artistique et sont surtout destinées à une consommation "courante" de particuliers ou  de restaurants recherchant surtout un moindre coût. Pour ma part, si toutes les pièces céramiques n'ont pas la même qualité d'exécution et la même valeur artistique, je trouve que ces pièces ne doivent pas forcément être rejetées car elles ont leurs qualités propres. De plus, le genre Hidasuki peut être vu comme une réponse aux  contingences modernes et comme une preuve de la vivacité du style de Bizen, qui perdure depuis le 12ème siècle. On notera enfin qu'avec les moyens de cuisson modernes, le Goma, le Sangiri et l'Aobizen peuvent être obtenus de façon tout à fait artificielle et ne sont plus "réservés" aux cuissons au bois.