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27 avril 2016

Les 400 ans de la porcelaine d'Arita

sometsuke

La porcelaine d'Arita fête cette année ses 400 ans. En effet, les débuts de la production de porcelaine à Arita dateraient de 1616 et seraient l’œuvre d'un potier coréen, Kanegae Sanpei ou Kanegae Sanbe ( également appelé Ri Sampei ou Yi Sam-pyeong et qui serait mort en 1655 ) venu s'installer au Japon, qui aurait également découvert le gisement de Kaolin d'Izumiyama, sur les hauteurs à l'est d'Arita.

gisement de Kaolin de Izumiyama
Arita et le gisement de Kaolin d'Izumiyama. Carte © Google Inc.

porcelaine imari
Le gisement de Kaolin d'Izumiyama. Photographie © Google Inc.

Naturellement, tout ceci est plus ou moins mythique, comme souvent lorsqu'un seul personnage est mis en avant, Ri Sampei étant enterré au sanctuaire Sueyama et étant devenu une figure légendaire. L'établissement de divers fours serait ainsi plutôt le fait d'un groupe d'individus emmenés, de gré ou de force, par Toyotomi Hideyoshi lors des invasions de la Corée de 1592 - 1598. Néanmoins, des fouilles archéologiques confirmeraient les débuts de la production de porcelaine entre 1610 et 1620, époque ou la production de porcelaines commence à être mêlée à la production de grès.

L'histoire de la porcelaine japonaise est donc bien moins longue que celle de la porcelaine chinoise. Cependant, rapidement, la porcelaine japonaise va supplanter la porcelaine chinoise dans le commerce vers l'Occident, tout au moins en valeur, la qualité des porcelaines japonaises étant bien supérieure aux porcelaines d'exportation chinoises.

La porcelaine produite dans la région d'Arita, que l'on appelle aussi porcelaine de Hizen ou Hizen Yaki car la production elle-même est répartie dans un vaste espace autour d'Arita, si elle commence avec des bleu et blanc, que l'on appelle Sometsuke, se diversifie très rapidement et propose une palette variée et colorée, le type Imari, qui sera copiée par la suite par les porcelaines d'exportation chinoises. Si la typologie des Imari fera l'objet d'articles ultérieurs, on trouve ainsi, les Sometsuke, Ko-kutani, Kakiemon, Nabeshima, Kinrande et I-roe. Mais ces styles se mélangent parfois et ne sont pas aussi imperméables que l'on veut bien le croire.

Néanmoins, il est à souligner que la production de porcelaine est ininterrompue dans la région d'Arita depuis le début du XVIIème siècle et que l'on continue à y perpétuer la plupart des styles anciens et à fonctionner sur des modes qui ne sont pas si éloignés des anciennes pratiques de production et de commerce.

atelier de potier japonais

Sur la photographie ci-dessus, on voit ainsi ce que pouvait être le fonctionnement d'un atelier, où les tâches sont réparties entre différentes spécialités, de la préparation de la terre à l'application du décor, en passant par le tournage et sans oublier également la vente finale, le client ou le marchand qui va ensuite diffuser la marchandise venant sélectionner des pièces sur le lieu même de production.

On retrouve ainsi, de haut en bas et de gauche à droite, parfois très imagée, la préparation du bois, l'extraction de l'argile, l'acheminement de la matière première à l'atelier, le concassage de la terre, le filtrage de celle-ci pour éliminer les impuretés, le tournage, la décoration, l'émaillage et le séchage, la réparation du four et l'enfournement puis, pour finir, la cuisson au bois, le stockage, la vente, ...

porcelaine d'arita atelier de potier
porcelaine sometsuke porcelaine imari
atelier de potier japon blog sur le thé et la céramique
four anagama four dragon

Depuis, bien peu de choses ont changé, sauf peut être l’extraction, désormais industrielle, et  la cuisson, qui ne se fait plus au bois que pour certaines productions d'exception. La porcelaine d'Arita reste enfin très vivace et est ancrée dans la modernité avec de nouvelles productions, alliant savoir ancestral et motifs contemporains. Ne reste plus qu'à souhaiter un anniversaire faste à la porcelaine d'Arita, malgré le tremblement de terre qui a récemment endeuillé l'île de Kyushu, et à espérer qu'elle restera productive longtemps encore.

20 novembre 2015

La porcelaine : Les bases techniques

imari japonais

Les pâtes de porcelaine sont constituées, à peu de choses près, d'une moitié de kaolin, d'un quart de silice et d'un quart de feldspath. La couleur blanche de la porcelaine est due au fait que le kaolin contient essentiellement des silicates d'aluminium tout en contenant une part infime d'oxyde de fer.

Si la plupart des articles de porcelaine sont fabriquées par moulage ( que ce soit par coulage dans un moule ou par pressage dans une forme ), certaines porcelaines peuvent être également tournées. Dans ce dernier cas, on obtient généralement des pièces assez épaisses.

La technique du pressage est assez facile à comprendre : on applique la pâte de porcelaine sur une plaque, on l'égalise à la presse ou au rouleau, on la découpe à peu près à la taille du moule plat, on l'insère dans le moule plat, on presse la contre-forme puis on découpe ce qui dépasse. Ne reste plus qu'à retirer la pièce moulée et la laisser sécher :
moulage de la céramique
On obtient ainsi des pièces standardisées suivant l'atelier ou les ateliers. Cette méthode est très pratique, en particulier pour les pièces plus ou moins plates, comme les plats, les assiettes et les bols.

La technique du coulage est tout aussi simple : on coule la pâte de porcelaine liquide sur ou dans une forme, on évacue l’excédent, on laisse sécher, puis on recommence l'opération, jusqu'à obtenir l'épaisseur finale désirée :
coulage de la porcelaine
Aujourd'hui, bien sûr, cette technique s'est "modernisée" et il suffit de projeter des couches fines avec du matériel du type des pistolets à peinture qui fonctionnent avec un simple compresseur. C'est par le biais de cette technique que l'on obtient les articles de porcelaine les plus fins et donc les plus translucides.

thé et céramique

En effet, si la caractéristique principale de la porcelaine est de laisser passer la lumière, toutes les porcelaines ne sont pas égales sur ce plan : plus une porcelaine est  épaisse, moins elle sera translucide et donc les porcelaines tournées et bon nombre de porcelaines moulées, même s'il ne faut pas les confondre avec les faïences, ne sont généralement que peu, voire pas du tout, translucides.

Guan Yin en porcelaine
 
Reste la technique du tournage qui concerne en général des pièces  de forme assez simple, pour lesquelles on place une boule de pâte sur un tour de potier et on procède ensuite au montage.

Cette technique laisse généralement des traces visibles à l’œil, rarement à l'extérieur de la pièce car on peut y procéder à un lissage avec un instrument en bois, mais le plus souvent à l'intérieur. Malgré tout, en passant la main sur l'extérieur d'une pièce tournée, on pourra sentir les traces d'un tel façonnage.

porcelaine japonaise imari

Pour ce qui est de la cuisson des porcelaines, une fois la pièce sèche, on procède à une première cuisson sans émaillage entre 900° et 1000° Celsius sans que cette dernière température soit dépassée. On obtient une pièce de porcelaine plus ou moins tendre et plus ou moins poreuse selon la température de cette première cuisson. C'est à cette étape que l'on applique les décors sous couverte.

On procède ensuite à l'émaillage puis à la cuisson définitive entre 1260° et 1400° Celsius. La porcelaine devient alors très faiblement poreuse, d'autant plus qu'elle a dès lors une couverte translucide. Cette cuisson à haute température entraine de forts risques de déformation et un retrait important qui marquent parfois les pièces. C'est après cette étape, une fois la pièce refroidie, que l'on procède à la pose du décor sur couverte puis à une cuisson vers 800° Celsius au moins.

blanc de chine

9 octobre 2015

Porosité, température de cuisson et structure chimique

hagi yaki

Pour le buveur de thé, la porosité des ustensiles qu'il utilise va jouer un rôle non négligeable sur le résultat final. En fonction du résultat voulu, il se tournera donc vers la porcelaine ou une terre très poreuse, en passant par toutes les variations et les combinaisons d'ustensiles possibles.

C'est ici que la température de cuisson rentre en ligne de compte. Du grès Raku cuit aux alentours de 750° Celsius à 1000° Celsius qui sera très poreux à la porcelaine imperméable car cuite entre 1250° Celsius et 1400° Celsius, on voit aisément quel rôle joue la température de cuisson sur les pâtes contenant de l'argile, du kaolin, de la chamotte, de la silice et / ou du feldspath. Si l'on excepte la faïence, plus la température est élevée, plus le résultat est imperméable car vitrifié.

thé et céramique
Un tesson d'un grès Raku. On constate que la brisure n'est pas lisse, signe d'un vitrification imparfaite qui explique la porosité des pièces engendrées par ce type de cuisson

blog sur la céramique
Un tesson de porcelaine. On constate que la brisure est plus nette, signe d'une haute vitrification qui explique l'imperméabilité des pièces engendrées par ce type de cuisson. Au passage, c'est aussi la haute température de cuisson qui va également faire migrer les particules d'oxyde de fer et créer des agrégats.

C'est ici que rentre en ligne de compte la composition chimique de la pâte, qui explique notamment que la faïence réagisse différemment :

Si l'argile constitue la plus grande part d'un objet en céramique, ce sont bien souvent les adjonctions qui vont donner à l'argile ses qualités plastiques et donc aider au modelage. Ainsi, la pâte de porcelaine, doit souvent être façonnée par coulage ou par pressage ( avec l'aide de moules donc ) car trop liquide et c'est le biscuitage ( une première cuisson à des températures entre 900° Celsius et 1000° Celsius ) qui va lui donner sa tenue.

C'est l'adjonction de chamotte, de la silice et / ou du feldspath qui va faciliter le modelage, tout en augmentant l'imperméabilité de l'argile et donner à celle-ci de la tenue, lui permettant notamment de rester debout avant la cuisson et de ne pas s’affaisser sur elle-même.

La faïence représente une exception à cet effet de progressivité entre la température de cuisson et l'imperméabilité car sa structure chimique diffère. La faïence est en effet cuite entre 1000° Celsius et 1200 ° Celsius, ce qui devrait lui conférer une certaine imperméabilité, mais au contraire des terres cuites, des grès et des porcelaines, on ajoute à l'argile qui va servir à composer les faïences du calcaire. C'est cette structure chimique différente qui va induire une forte porosité et une plus grande fragilité structurelle malgré une température de cuisson relativement importante.

14 mars 2015

Verre versus Porcelaine

petit gaïwan en porcelaine

On peut souvent lire que la porcelaine a un rendu plus neutre sur un thé et, en effet, en comparaison d'une terre, c'est une réalité. Mais une autre gamme d'ustensiles permet également un rendu neutre : ceux en verre.

En effet, le degré de porosité de la porcelaine, bien que très peu élevé, est cependant supérieur à celui du verre, dont la vitrification est complète et qui est donc complètement imperméable.

gaïwan en verre

Du fait de ses qualités plastiques, le verre en fusion permet de produire à peu de chose près n'importe quelle forme, le tout à un prix modique. Grâce à des additifs, il peut devenir résistant à la chaleur et devient dès lors intéressant pour la production d'ustensiles pour le thé.

Le verre utilisé est donc un verre dit borosilicate, car à la silice, principale composante qui va être vitrifiée est ajouté du trioxyde de bore qui va lui donner sa qualité réfractaire ... On trouve dès lors en verre tout ce que l'amateur de thé cherche : Gaïwan, Zhong, théière, tasse, ...

pichet a thé en verre

On pourrait même dire que, techniquement parlant, les ustensiles en verre sont supérieurs aux ustensiles en porcelaine ... de même, si l'on prend l'aspect financier en compte, les ustensiles en verre sont généralement moins onéreux et celui qui commence à s'intéresser au thé peut à peu de frais se constituer une réserve d'ustensiles de base qui lui permettront d'infuser tous types de thés.

Cependant, la supériorité du verre s'arrête aux simples aspects financiers et techniques, car le thé, ce n'est pas seulement une utilisation d'ustensiles ou de techniques diverses d'infusion, c'est surtout une culture à part entière, étrangère au monde occidental, et une approche esthétique que le verre, malgré tous les services qu'il peut rendre, ne permettra toutefois pas d'appréhender ...

11 juin 2014

Le décor de la porcelaine : Sur ou Sous couverte ?

Imari chinois

A ses débuts l'amateur de porcelaine est souvent confronté à des termes divers dont le sens profond lui est, en général, assez hermétique. Parmi ceux-ci, les termes de " décor sur couverte " ou " décor sous couverte " sont peut être ceux qui, au premier abord, sont les plus abstraits à appréhender. Cela repose en partie sur le fait que la composition de la porcelaine est souvent mal comprise et vue comme un bloc monolithique passant tel quel des mains du potier à celles de l'utilisateur et subissant juste un petit passage au four.

Il faut tout d'abord savoir que la pâte de porcelaine n'est pas, en elle même, imperméable. C'est l'adjonction d'une couverte ou glaçure qui va, lors du processus de cuisson, par la vitrification, lui conférer la particularité d'être presque aussi imperméable que le verre. L'apposition de cette couverte ou glaçure est donc un trait commun entre la porcelaine et tout autre type de grès émaillé.

A partir de là, la seule particularité qui va distinguer la porcelaine des autres céramiques est l'utilisation de couvertes translucides pour faire ressortir la blancheur de la pâte de porcelaine. les producteurs de tels objets, après quelques siècles ( les premières couvertes des articles porcelaineux allant du céladon au blanc crème en passant par le jaune ), se rendront bien compte de la possibilité de fixer un décor sous cette couverte translucide.

Imari chinois

Pour la réalisation de décors sous couverte, deux types de pigments s'appliquent presque exclusivement, donnant deux couleurs bien précises : le rouge tiré du cuivre et le bleu tiré du cobalt. Le rouge de cuivre donne un rouge qui semble manquer de vigueur et est généralement utilisé seul en décor sous couverte. Le bleu de cobalt constitue d'abord à lui seul le décor sous couverte des porcelaines blanc bleu. Ces deux couleurs sont utilisées car elles peuvent " résister " à une cuisson à haute température, nécessaire pour la vitrification de la porcelaine, tout en ne laissant pas les motifs décoratifs " s'épater " ou se " diluer " lors de cette étape de vitrification de la couverte. Ces deux couleurs, en se retrouvant donc sous la couverte transparente gagnent également en permanence, étant protégés par la-dite couverte.

Le bleu de cobalt tenant mieux la précision du trait que le rouge de cuivre qui tend à ne pas conserver un trait trop fin, il a donc été largement utilisé pour former le support d'un décor  polychrome qui sera appliqué sur la couverte.

Ainsi, la pose d'un décor polychrome, comme celui des articles de porcelaine de style Imari, se fera toujours de la façon suivante : Premièrement, une application du décor de cobalt sous couverte puis une cuisson à haute température ( plus de 1260 ° Celsius ) qui va donc produire une porcelaine blanc bleu. A une telle pièce, on applique un décor polychrome qui vient donc se placer sur la couverte d'où le terme parfois usité de " sur-décoration ". Une fois ces nouveaux émaux appliqués ( les ors, les verts, le rouge de fer - qui donne un rouge vif -, le noir, ... ), on procède à une deuxième cuisson à basse température ( 800 ° à 1000 ° Celsius ) pour fixer les-dits émaux.

Porcelaine chinoise ancienne

Porcelaine chinoise ancienne

Porcelaine chinoise ancienne

Outre le fait que seul le bleu de cobalt ou presque est appliqué sous couverte, les émaux sur couverte se détectent facilement par un ensemble de moyen faciles à mettre en œuvre.

Tout d'abord par la vue, en jouant avec le reflet de la lumière sur une pièce de porcelaine. Ainsi le décor sur couverte semblera " mat " car non vitrifié alors que le décor sous couverte sera " brillant " car placé sous la couche vitrifiée, comme sur les trois photographies ci-dessus.

Ensuite, plus facilement encore, par le toucher, l'application des émaux du décor sur couverte laissant un relief ( comme cela peut se voir sur les photographies ci-dessous ) qu'il est aisé de sentir en touchant directement la pièce.

Arita Yaki Arita Yaki
Porcelaine d'Arita Porcelaine de Satsuma

Porcelaine chinoise ancienne

Toutes ces diverses remarques s'entendent naturellement pour les décors appliqués manuellement, et non pas pour ceux appliqués de façon contemporaine par transfert, d'un bloc, d'une décalcomanie et cuisson à basse température pour des pièces moulées industriellement.

Pour l'anecdote, l'application d'un décor sur couverte permettra également, par de petites variations du motif, d'essayer de camoufler les petites imperfections de la cuisson comme le montre l'exemple suivant ( n'hésitez pas, cliquez sur les photographies, ce sera mieux en " plein écran " ) :

Porcelaine de Satsuma Porcelaine de Satsuma

Toutes ces considérations prises en compte, les possibilités décoratives sont presque sans limites mais l'application des divers émaux de couleurs et la réalisation des décors nécessitent d'être pensés à l'avance, dès avant même l'application du bleu de cobalt sous couverte. La réalisation d'un décor polychrome est donc le résultat de nombreuses étapes plus ou moins périlleuses ( comme les cuissons ) ou complexes ( avec l’interaction des motifs en bleu de cobalt que viennent compléter les autres couleurs ). La plus petite pièce à décor polychrome peint à la main prend donc dès lors une dimension toute particulière ...

Porcelaine japonaise ancienne

Porcelaine japonaise ancienne

Porcelaine chinoise ancienne

9 juin 2014

Porcelaine : Les traces d'usure

Le lapin dans la lune

Les traces de manufacturation ne sont pas les seuls traces que l'on observe sur la porcelaine. On peut également y observer des traces d'usures. Celles-ci sont spécifiques aux porcelaines qui prennent de l'âge car elles sont liées à leur utilisation, aux frottements, empilements, chocs, ..., bref, à un usage plus ou moins intensif.

La première grande trace d'usure est très facile à voir et touche un type d'émail en particulier : la dorure. Celle-ci est en effet relativement fragile et résiste mal aux frottements. Les aplats résistent cependant mieux que les ors posés sur les bordures.

Moineau dans une branche

Le lapin dans la lune

Une autre trace d'usure, qui résulte d'un accident puisque engendrée par un choc la plupart du temps, est le fêle. Lorsqu'il est très fin, il prend le nom de "cheveu" mais il s'agit toujours d'un fêle, d'une fêlure. Il se détecte très facilement, en passant la pointe de l'ongle dessus, car on ressent alors l'accroc là où l'ongle devrait glisser. Le même fêle se retrouve également sur les deux faces d'une pièce.

Assiette chinoise 18ème siècle à cerise

Assiette chinoise XVIIIème siècle à cerise

Mais les traces les plus communes sont cependant les rayures de la couverte. Naturellement, plus la pièce de céramique est destinée à un usage courant, plus ces rayures sont censées être nombreuses. Ainsi, en toute logique, les petites coupes, les contenants, bols et assiettes très simples à usage journalier sont théoriquement plus sujets à porter de nombreuses traces qu'une vaisselle de prix très décorée et réservée aux grandes occasions ou que les grandes pièces d'apparat tels que vases ou potiches de décoration. C'est donc ici que la connaissance des formes de la céramique ancienne et des tâches auxquelles étaient destinées ces formes est utile.

Imari chinois

Imari chinois

Imari chinois

Pour repérer au mieux ces traces, on " joue " avec la lumière qui va ainsi permettre de voir les atteintes à la couverte qui apparaissent mates. Ceci est dû à la similitude entre le verre et la couverte de la porcelaine, qui est translucide. Si ces traces sont le résultat d'un usage régulier et répété, elles sont également de formes aléatoires et sont aléatoirement réparties sur l'ensemble de la pièce. Elles ne reproduisent donc normalement pas un schéma répétitif, comme des traces qui auraient été faites volontairement et seulement à certains endroits visibles comme cela se voit parfois pour les faux. C'est la raison pour laquelle l'observation de ces usures apprend un certain nombre de choses à l’œil averti.

Porcelaine chinoise ancienne

Ainsi, entre les traces d'usures, les traces inhérentes à la fabrication des pièces anciennes et les autres contraintes techniques auxquelles étaient soumis les anciens, on comprendra aisément qu'il est assez peu rentable pour d'éventuels faussaires d'essayer de fabriquer des copies de pièces de consommation courante peu raffinées qui se vendront au final  assez mal même à une cinquantaine d'euros au mieux ... dès lors, le moyen le plus courant pour d'éventuels vendeurs de faire passer des pièces récentes pour anciennes est juste de mentir, volontairement ou par ignorance, sur l'âge réel des pièces. Un rapide examen pourra dès lors facilement confirmer ou infirmer une datation ancienne pour de telles pièces, mais les choses commencent à se gâter pour les grandes pièces plus onéreuses ou pour les céramiques de qualité ... à partir de là, comme je l'ai déjà écrit, pour une datation se rajoute toujours une étude du décor, de la forme et de l'éventuelle signature ou de l'éventuelle mention portée sur la pièce qui doivent correspondre à la même époque. Cette étape ci requiert par contre une certaine expertise et une certaine formation et ne s'improvise donc pas.

5 juin 2014

Porcelaine : Les traces de manufacturation

A côté des traces liées à la fabrication de la pâte de porcelaine exposées précédemment, on rencontre diverses traces dues à la manufacturation, qui seront, cette fois-ci, également observables pour les grès. Ces traces, bien souvent involontaires, sont fréquentes dans les porcelaines anciennes car elles sont le résultat de ce que l'on pourrait considérer comme des nécessités techniques impératives pour certaines et plus ou moins comme des accidents pour d'autres.

Les traces de fabrication sont peu nombreuses et essaient toujours d'être les plus discrètes possible le cas échéant. L'artisan essayera en effet toujours, pour des raisons esthétiques et quand les contraintes techniques le permettent, de disposer ces traces au dos d'une pièce ou dans les parties non visibles au premier abord.

Assiette Imari chinois

Voici tout d'abord, bien centrée, la trace laissée par un plot de soutient, que l'on appelle pernette. En effet, plus la pièce est longue ou large, plus elle est susceptible de se déformer lors de la cuisson. On va alors essayer de la soutenir lors de cette cuisson par de petits plots d'argile réfractaire. Le contact de ceux-ci avec l'émail laissera cependant automatiquement une trace visible.

La plus grosse trace de manufacturation est elle aussi généralement située dans la partie non exposée directement à la vue. Là encore, c'est un endroit ou la pièce est posée en contact avec le four ou la caissette de cuisson, le cul de la pièce, la base sur laquelle elle reposera également par la suite lors de son utilisation.Ici aussi , donc, la couverte ne peut donc pas tenir.

Assiette Imari chinoise

Ces deux types de traces sont plus ou moins volontaires, ou du moins prévisibles dès la conception de la pièce. Mais une dernière trace de manufacturation peut également se croiser sur les pièces anciennes de "grande série" produites pour des utilisations quotidiennes ou presque. Cette trace ci résulte d'un "accident" et n'est pas voulue : l'agrégat de sable.

Dans les fours où la cuisson se fait au bois, le sol est généralement en terre ou en briques réfractaires. Mais il arrivait également que le sol du four soit tout simplement recouvert de sable. Pour faire court, le sable est majoritairement composé de silice qui sert à fabriquer le verre si on lui adjoint un fondant qui va faire baisser sa température de fusion et de vitrification. Le sol en sable du four ne risque donc pas de fondre pour se transformer en verre, mais il arrive que sous les variations de température se forment, sous certaines pièces mises à cuire sur ce type de "sol", des agrégats de sable qui vont coller et se fondre à la couverte.

Bleu de Hué

Après les traces dues à la manufacturation, on rencontre deux types de traces "accidentelles" induites spécifiquement par la cuisson au bois et ses variations de température lorsqu'elle est inégalement maîtrisée. On les rencontre donc essentiellement sur les céramiques anciennes et sont considérées comme des défauts mais sans gravité.

Tout d'abord, la trace la plus courante est le fêle sous couverte. Ce type de fêlure se produit lorsque la porcelaine non encore totalement cuite se contracte / rétracte pendant cette cuisson suite à une variation de température. De tailles variables, ces fêles sont cependant comblées en totalité ou en surface par la couverte car la cuisson n'est pas terminée au moment de leur formation et on pourra donc les différencier facilement d'un fêle résultant d'un choc, car en passant l'ongle dessus, on sent bien qu'elles n'accrochent pas et semblent "lisses" au toucher. Cependant certains fêles sont parfois trop importants et les tensions mécaniques sur la pièce lors de la cuisson vont entrainer la cassure totale de cette dernière.

fêlure ou fêle dans la porcelaine

fêlure ou fêle dans la porcelaine

Le deuxième accident de cuisson est lui purement esthétique : le retrait d'émail de décoration. Ce retrait se produit lors de la seconde cuisson qui sert, comme on peut le deviner, à fixer les émaux sur couverte qui servent à décorer une pièce de céramique. Comme son "confrère" de la première cuisson, ce type de retrait se forme lors d'une cuisson mal maîtrisée :

Assiette Imari chinoise

L'émail se rétracte alors et forme soit des bourrelets ( flèches rouges ) soit un renforcement de l'épaisseur de l'émail dans certaines zones, laissant des blancs dans d'autres ( flèches bleues ). Comme il s'agit techniquement d'une couverte secondaire placée au-dessus de la première couverte, l'intégrité physique de la pièce n'est jamais mise en cause ... par contre, la deuxième cuisson nécessaire pour fixer cet émail de décoration entraine la cassure de pièces fragilisées par un fêle sous couverte trop important, mais c'est un autre sujet ...

Assiette Imari chinoise