Céramique Japonaise | DemysTEAfication
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7 novembre 2014

Porosité(s) et effet(s)

Arita porcelaine ko sometsuke

Le choix d'un instrument pour le thé peut se faire pour de multiples raisons. Il peut y avoir la recherche esthétique, celle d'une forme particulière ou encore, et c'est celle qui va être abordée ici, celle d'un effet particulier sur le thé. Pour ce point particulier il faut, à mon sens, prendre avant tout en considération la porosité de la matière utilisée, qui sera d'une grande influence.

On vante parfois la supériorité de la porcelaine sur les autres types de terre ... De fait, c'est une pratique fort ancienne, qui semble remonter aux débuts de la commercialisation de la porcelaine elle-même, pour une raison à priori fort simple : ses qualités esthétiques et sa capacité à accrocher la lumière, mais aussi sa relative nouveauté lors de son introduction en Europe et enfin, sa supériorité technique par rapport aux autres types de céramique.

La porcelaine présente, en effet, la caractéristique d'être la moins poreuse des céramiques, raison pour laquelle elle permet de réaliser des instruments pour le thé qui n'en modifieront pas le goût ... du moins en théorie ...

... car l'affirmation doit être quelque peu nuancée. Tout d'abord, la porcelaine non frittée, également parfois appelée biscuit, et qui n'est donc pas recouverte d'une couche cristalline translucide semblable au verre est poreuse et s'il elle est en plus insuffisamment cuite, elle est tout aussi poreuse que n'importe quelle céramique. Cet aspect est assez facile à constater, les parties non frittées d'une porcelaine se teintant facilement au contact du thé.

base de théière en porcelaine non frittée

De la même manière, les porcelaines avec un décor sur couverte, risquent également de se révéler faiblement poreuses, du fait des caractéristiques héritées de leur processus de production ( en particulier les multiples traces de manufacturation ), les émaux sur couverte étant cuit à des températures moins élevées.

thé et céramique

Ainsi, des porcelaines récentes issues d'un processus de fabrication maîtrisé devraient se révéler moins poreuses que d'anciennes pièces, d'où la relative absence de besoin absolument nécessaire de posséder des pièces de porcelaine ancienne ... du moins sur un strict plan technique ... Quoi qu'il en soit, ces pièces seront toujours plus poreuses que le verre et, toujours en restant sur le plan strictement technique, celui qui recherche avant toute chose l'absence complète de modification des arômes du thé par son contenant devra en faire sa priorité. Les instruments en verre possèdent en outre la particularité d'être relativement moins onéreux que leurs homologues de céramique, ce qui ne pourra que ravir le néophyte peu équipé qui commence son cheminement sur la voie du thé ...

thé et céramique

En fonction des porosités et des effets possibles, on obtiendrait donc le classement suivant, du moins poreux au plus poreux ( et donc de l'ustensile le plus neutre dans le rendu de la liqueur à l'ustensile le moins neutre dans ce même rendu ) : verre, porcelaine récente, porcelaine ancienne, grès avec couverte, grès sans couverte, terre cuite ... La terre cuite présentant peu d'intérêt du fait de ses faibles capacités en matière de perméabilité, elle n'est plus utilisée pour fabriquer des récipients destiné à autre chose qu'à contenir des plantes ... et encore, pour l'extérieur seulement ... reste à aborder le cas du grès, ou plutôt des grès, car il y a là quelques variantes qui méritent d'être prises en considération.

thé et céramique

Le grès est la famille de céramique qui est peut être la plus large ... quelques centaines de degrés Celsius seulement séparent ces trois pièces mais cet écart va jouer un rôle important. Car entre un grès cuit aux environs de 750° Celsius et un grès cuit à 1250° Celsius, on peut constater quelques différences de porosité qui seront donc susceptibles de jouer sur le rendu d'une liqueur. Une cuisson en Raku donnera un résultat très poreux, et un grès cuit dans la zone de température basse sera plus poreux qu'un grès cuit dans la zone de température haute. Ainsi, les grès du style de Bizen ou de Karatsu seront moins poreux que d'autres, tels ceux de Hagi, qui le seront à leur tour moins ( du fait de leur couverte ) que les grès à moindre température de cuisson. Les couvertes jouent, en effet, ici, un rôle important, qui ne se limite pas seulement à un aspect esthétique ou décoratif. Si l'on a cherché à appliquer des glaçures sur les céramiques, c'est également car ces glaçures renforcent l'imperméabilité immédiate des pièces ainsi réalisées.

Au final, plus la température de cuisson sera élevée, plus la vitrification, suivant la terre utilisée, sera complète et moins le résultat final sera poreux et le rendu dans la tasse proche du thé seul ... et à ce jeu, les instruments de verre et, dans une moindre mesure, ceux de porcelaine, sont imbattables.

Mais porosité n'est pas non plus synonyme de qualité inférieure. L'utilisation d'instruments poreux entraine simplement d'autres résultats dans la tasse que ceux engendrés par les produits vitrifiés, il suffit d'en avoir conscience et de faire des choix en conséquence ... pourquoi des choix ? Parce que si les types de terre vont jouer un rôle, c'est l'art du potier qui va jouer le plus grand rôle et il y aurait presque un effet par théière ...

terre de yixing

Car suivant l'architecture de cette dernière, le résultat va être différent. Le contact de la liqueur avec la terre étant relativement bref, les interactions sont donc limitées ... pour renforcer celles-ci, l'habileté du potier entre en jeu ... c'est ce qui explique que certaines théières soient plus ou moins fines, aient ou non des couvercles aux bords surdimensionnés ou encore soient munies de fines striures en leur cœur qui ne sont pas seulement le résultat d'un éventuel affinage des parois, mais aussi un moyen de maximiser les surfaces de contact entre la liqueur et la terre ... et conduit également à de grands débats autour du culottage ...

théière en terre épuisée de yixing

Quoi qu'il en soit, que l'on préfère la "fidélité" de la vitrification ou l'"alchimie" de la terre, le choix est aussi vaste que le nombre de chemins sur la voie du thé, chacun doit suivre le sien, en suivant ses envies ...

26 octobre 2014

Yuzamashi

boite chinoise ancienne

Voici un accessoire pour la préparation du thé typiquement japonais. Il ne sert qu'à une seule chose : refroidir l'eau sortant bouillante de la Tetsubin ( donc dans les 95° Celsius ) pour lui faire atteindre les températures plus faibles utilisées pour l'infusion des thés japonais ( 60° Celsius à 75° Celsius en général ). Cette eau refroidie est ensuite versée dans le Kyusu pour l'infusion du thé, le thé une fois infusé n'étant pas reversé dans le Yuzamashi mais directement dans des tasses.

Pour connaitre la température atteinte par l'eau après  avoir directement versé l'eau dans le Yuzamashi, mieux vaut, au cours des premières utilisations et si l'on veut connaitre précisément le refroidissement atteint, utiliser un thermomètre car chaque ustensile va réagir différemment et donner sa gamme de température - je parle de " gamme " car il peut y avoir de micro-différences -, contrairement à ce que l'on peut parfois lire à droite et à gauche.

Le processus de refroidissement, lui, est par contre très simple. Il suffit de verser l'eau bouillante dans le Yuzamashi pour que le contact avec la terre, plus froide que l'eau, absorbe une partie de cette chaleur et fasse donc baisser celle de l'eau ...
 
Yuzamashi

En conséquence, cela veut aussi dire que le Yuzamashi va monter en température et que, dès lors, sa prise en main risque d'être problématique en fonction de sa forme, sa structure et de l'épaisseur de ses parois ... Plus un Yuzamashi sera fin, plus ses parois absorberont rapidement la chaleur et plus il la dissipera également plus rapidement tout en étant par conséquent difficile à prendre en main. Un Yuzamashi avec des parois épaisses aura tendance à refroidir l'eau rapidement après la verse, mais dissipera relativement moins bien la chaleur ensuite.

Yuzamashi

Naturellement, il existe toutes tailles et toutes formes de Yuzamashi, car il existe toutes formes et toutes tailles de Kyusu et de Tetsubin ... On se laissera donc guider par l'envie du moment ou par la matière pour faire son choix si l'on veut en acquérir un ... Ou on peut se concentrer sur deux ou trois aspects techniques destinés à faciliter la vie de l'utilisateur en facilitant la prise en main de l'instrument ... ou au moins destinés à réduire les risques de brûlures ...

Des bords hauts relativement marqués et courbés :

Yuzamashi Hagi yaki

Des bords hauts plus épais :

céramique japonaise japanese ceramic

Des "pastilles" de céramique de toutes tailles sur les côtés :

ustensile pour le thé du japon

Bien entendu, tous ces aménagements fonctionnent plus ou moins bien selon les cas, des pastilles de céramique bien proéminentes et des bords hauts taux aussi proéminents étant les aménagements les plus efficaces pour se prémunir contre les effets d'un eau très chaude ...

A l'origine, le Yuzamashi était un instrument indispensable pour la préparation du Sencha, car n'oublions pas que l'eau courante au robinet qui plus est exempte de bactéries néfastes pour l'être humain est une invention relativement récente dans l'histoire de l'humanité ... Aujourd'hui, avec les bouilloires électriques réglables à la dizaine de degrés près, quand ce n'est pas au degré près, et à l'absence de nécessité de faire bouillir l'eau quelques minutes avant de pouvoir la consommer, cet accessoire a donc perdu de son utilité en tant qu'ustensile de refroidissement. Il peut cependant servir de récipient pour "égaliser" une infusion avant de la répartir dans différentes tasses, ou encore, dans le cas des thés du Japon en particulier, mais aussi de tout thé charriant un certain nombre de débris, servir à "décanter", comme un filtre, les morceaux de feuilles plus ou moins importants ... pour ce dernier emploi, la forme en " creuset ", en photographie directement ci-dessus, qui fonctionne parfaitement pour cet usage.

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3 octobre 2014

Hagi Yaki : Cuisson au bois ou cuisson au gaz ?

céramique de Hagi ceramic Shibuya Deishi
Pièce Hagi cuite au gaz, réalisée par Shibuya Deishi

La céramique de style Hagi, bien que non réductible à une seule sorte de couverte, est toutefois caractérisée par une couverte de couleur blanche, assez crémeuse et relativement douce.

Cependant, au sein de cette couverte largement dominante dans le style de Hagi, une différence de taille mérite d'être soulignée : la cuisson traditionnelle au bois et les effets particuliers qu'elle engendre ...

Hagi cuisson au bois Hatao Yoshika

Céramique de Hagi cuisson traditionnelle Hatao Yoshika

Hatao Yoshika

La cuisson traditionnelle au bois des céramiques de Hagi se fait en four grimpant, que l'on appelle aussi " four dragon " ou encore noborigama. Ce type de cuisson au bois va produire des effets sur la couverte blanche, faisant passer celle-ci entre toutes les nuances allant du rose foncé au rose clair.

Les effets de couleur produits sont le résultat de l'exposition aux flammes et surtout de l'exposition aux retombées de cendres, qui viennent se mêler à la couverte pour lui donner ses couleurs si particulières. Les faces des pièces directement exposées, face au feu et aux courants d'air chargé de cendres seront donc plus foncés, certaines parties exposées ne seront cependant que partiellement touchées par les retombées de cendres, là encore en fonction des courants d'air chaud, mais aussi des pièces avoisinantes, qui vont jouer sur ces courants, laissant parfois des plages plus blanches au sein d'espaces fortement colorés par les retombées de cendres, comme l'illustrent bien les différentes photographies, ci-dessus et ci-dessous.

Chaque pièce qui va sortir du four à bois sera donc absolument unique, résultat d'un processus aléatoire et impossible à reproduire à l'identique, même s'il permet de jouer sur les effets produits selon le placement des la pièce dans le four.

Comme toujours, les deux types de cuisson permettent chacune un résultat particulier et chaque type ainsi produit a des charmes qui lui sont propres.

Hatao Yoshika et Shibuya Deishi
Deux Yunomi de style Hagi, celui de gauche réalisé par Hatao Yoshika et cuit dans un four à bois et celui de droite réalisé par Shibuya Deishi et cuit dans un four à gaz

24 septembre 2014

Ao Bizen, le Bizen en réduction : cuit au bois ou pas ?

bizen a imbe

La céramique de Bizen est traditionnellement cuite au feu de bois, ce qui lui confère justement ses glaçures particulières et les effetsqui lui sont propres ... Mais aujourd'hui, tous les styles de Bizen peuvent être reproduits de manière "artificielle" ... tous ? Pas tout à fait exactement ...

Toute la difficulté réside alors à faire la différence entre une cuisson au bois, longue et onéreuse, et une cuisson au gaz ou au four électrique ( on notera toutefois que la cuisson électrique en réduction semble peu utilisée car difficile à maîtriser et semble abimer le four dans le cas contraire ), moins onéreuses et plus faciles à contrôler ... pour cela, il existe des signes qui ne trompent pas, encore faut-il les connaître ...

Le Ao Bizen ou Aobizen, va prendre sa teinte grise caractéristique du fait de sa cuisson en réduction, c'est-à-dire du fait d'une cuisson dans une atmosphère très pauvre en oxygène. L'application de cordes de paille autour de l'objet à cuire, celle-ci brulant pendant la cuisson, va laisser une empreinte visible : une glaçure de cendres ... le phénomène est le même pour tous les styles de la céramique Bizen, qu'ils soient cuits en réduction ou non, mais l'analogie s'arrête là.

Le Ao Bizen cuit au four à gaz ou au four électrique :

Aobizen de bizen

Le Ao Bizen cuit au four à gaz ou au four électrique va se caractériser avant tout par une surface un peu rugueuse, celle de la terre brute, presque identique à sa sortie du tour, la pièce étant également systématiquement d'une couleur gris clair. Cela est dû au fait qu'aucune retombée naturelle de cendres ne va couvrir petit à petit la surface de la céramique et constituer la glaçure.

céramique de bizen

Malgré tout, il va être possible de marquer la pièce de céramique ainsi cuite, notamment grâce à un entourage de cordelettes en paille de riz, comme cela se fait pour le Hidasuki. Cependant, au lieu de laisser des traces d'un brun rougeâtre, cette technique va laisser ici des traces allant du noir profond au gris crème. Caractéristique supplémentaire, cette technique va également former une couverte brillante et lisse à l'emplacement exact des cordes et à leurs abords immédiats, formant un contraste très facile à repérer à l’œil nu, comme l'illustre la photographie ci-dessus.

Le Ao Bizen cuit au feu de bois :

japanese ceramic ceramique japonaise bizen

Le Ao Bizen cuit au feu de bois va, lui, se couvrir d'une glaçure qui va recouvrir l'ensemble de la pièce de façon assez fine et lisse. Cet aspect particulier est dû spécifiquement aux techniques employées pour réaliser une cuisson au bois.

De fait, contrairement à la cuisson par gaz, ou tout le four va être consacré, pour une cuisson, à la cuisson en réduction et dont, par conséquent, toutes les pièces de la fournée visée seront cuites de la même manière, la cuisson au bois réalisée de façon traditionnelle ne cuit qu'une partie des céramiques d'une fournée en réduction. En effet, la majeure partie des pièces d'une fournée de cuisson au bois sera cuite en oxydation, de façon "courante", seule les pièces recouvertes par d'autres plus grandes et sans apport d'oxygène seront cuites en réduction.

Le phénomène est assez simple à comprendre : une fois les pièces de céramique recouvertes par une pièce plus grande, la cuisson enclenchée va produire des cendres qui vont isoler "sous cloche" les pièces cuites en réduction, l'oxygène résiduel présent sous cette "cloche" avant le début de cuisson étant consommé par cette dernière. Seules les cendres les plus fines semblent alors pouvoir s'insinuer sous cette cloche et contribueront à former cette glaçure caractéristique, relativement fine et lisse au toucher, oscillant entre le gris très foncé et un gris moyen, sur tout le corps de la pièce. Cette nuance de couleur et cette relative uniformité et finesse de recouvrement ne peuvent être, au jour d'aujourd'hui, reproduites correctement avec les techniques modernes de cuisson au gaz ou à l'électricité.

céramique de bizen cuisson traditionnelle au feu de bois

Les marques laissées par la combustion des cordelettes de riz sont elles aussi caractéristiques d'une cuisson au bois. Celles-ci, par contre, ne semblent pas pouvoir être reproduites sans respecter le processus d'une cuisson au bois.

Tout d'abord, contrairement au cas précédent, l'emplacement de combustion des cordelettes ne laisse pas une glaçure lisse mais, littéralement, un trait en léger relief. Cela est dû au fait que le reste du corps de la pièce va également avoir un apport de cendres fines qui formeront la couverte ... dès lors, les cendres issues de la combustion des cordelettes ne se "diluent" pas sur les zones situées à proximité. Le trait obtenu sera ainsi bien plus net que dans le cas du trait issu de la cuisson au gaz.

Ensuite, et cela se repère facilement, les traits obtenus ne sont tout simplement pas totalement noirs ! Une partie de la cuisson ayant eut lieu en oxydation, le temps que la "mise sous cloche" se fasse, le trait va donc prendre une coloration particulière, oscillant entre le gris noir et le gris beige, la ligne formée étant également marquée par endroits de petits points noirs de tailles inégales.

Les différences entre le Ao Bizen cuit au bois et le Ao Bizen cuit au gaz sont donc relativement marquées, au point que l'on pourrait considérer qu'il y a deux types distincts d'Ao Bizen, chaque type ayant des charmes particuliers que ne possède pas l'autre.

11 juin 2014

Le décor de la porcelaine : Sur ou Sous couverte ?

Imari chinois

A ses débuts l'amateur de porcelaine est souvent confronté à des termes divers dont le sens profond lui est, en général, assez hermétique. Parmi ceux-ci, les termes de " décor sur couverte " ou " décor sous couverte " sont peut être ceux qui, au premier abord, sont les plus abstraits à appréhender. Cela repose en partie sur le fait que la composition de la porcelaine est souvent mal comprise et vue comme un bloc monolithique passant tel quel des mains du potier à celles de l'utilisateur et subissant juste un petit passage au four.

Il faut tout d'abord savoir que la pâte de porcelaine n'est pas, en elle même, imperméable. C'est l'adjonction d'une couverte ou glaçure qui va, lors du processus de cuisson, par la vitrification, lui conférer la particularité d'être presque aussi imperméable que le verre. L'apposition de cette couverte ou glaçure est donc un trait commun entre la porcelaine et tout autre type de grès émaillé.

A partir de là, la seule particularité qui va distinguer la porcelaine des autres céramiques est l'utilisation de couvertes translucides pour faire ressortir la blancheur de la pâte de porcelaine. les producteurs de tels objets, après quelques siècles ( les premières couvertes des articles porcelaineux allant du céladon au blanc crème en passant par le jaune ), se rendront bien compte de la possibilité de fixer un décor sous cette couverte translucide.

Imari chinois

Pour la réalisation de décors sous couverte, deux types de pigments s'appliquent presque exclusivement, donnant deux couleurs bien précises : le rouge tiré du cuivre et le bleu tiré du cobalt. Le rouge de cuivre donne un rouge qui semble manquer de vigueur et est généralement utilisé seul en décor sous couverte. Le bleu de cobalt constitue d'abord à lui seul le décor sous couverte des porcelaines blanc bleu. Ces deux couleurs sont utilisées car elles peuvent " résister " à une cuisson à haute température, nécessaire pour la vitrification de la porcelaine, tout en ne laissant pas les motifs décoratifs " s'épater " ou se " diluer " lors de cette étape de vitrification de la couverte. Ces deux couleurs, en se retrouvant donc sous la couverte transparente gagnent également en permanence, étant protégés par la-dite couverte.

Le bleu de cobalt tenant mieux la précision du trait que le rouge de cuivre qui tend à ne pas conserver un trait trop fin, il a donc été largement utilisé pour former le support d'un décor  polychrome qui sera appliqué sur la couverte.

Ainsi, la pose d'un décor polychrome, comme celui des articles de porcelaine de style Imari, se fera toujours de la façon suivante : Premièrement, une application du décor de cobalt sous couverte puis une cuisson à haute température ( plus de 1260 ° Celsius ) qui va donc produire une porcelaine blanc bleu. A une telle pièce, on applique un décor polychrome qui vient donc se placer sur la couverte d'où le terme parfois usité de " sur-décoration ". Une fois ces nouveaux émaux appliqués ( les ors, les verts, le rouge de fer - qui donne un rouge vif -, le noir, ... ), on procède à une deuxième cuisson à basse température ( 800 ° à 1000 ° Celsius ) pour fixer les-dits émaux.

Porcelaine chinoise ancienne

Porcelaine chinoise ancienne

Porcelaine chinoise ancienne

Outre le fait que seul le bleu de cobalt ou presque est appliqué sous couverte, les émaux sur couverte se détectent facilement par un ensemble de moyen faciles à mettre en œuvre.

Tout d'abord par la vue, en jouant avec le reflet de la lumière sur une pièce de porcelaine. Ainsi le décor sur couverte semblera " mat " car non vitrifié alors que le décor sous couverte sera " brillant " car placé sous la couche vitrifiée, comme sur les trois photographies ci-dessus.

Ensuite, plus facilement encore, par le toucher, l'application des émaux du décor sur couverte laissant un relief ( comme cela peut se voir sur les photographies ci-dessous ) qu'il est aisé de sentir en touchant directement la pièce.

Arita Yaki Arita Yaki
Porcelaine d'Arita Porcelaine de Satsuma

Porcelaine chinoise ancienne

Toutes ces diverses remarques s'entendent naturellement pour les décors appliqués manuellement, et non pas pour ceux appliqués de façon contemporaine par transfert, d'un bloc, d'une décalcomanie et cuisson à basse température pour des pièces moulées industriellement.

Pour l'anecdote, l'application d'un décor sur couverte permettra également, par de petites variations du motif, d'essayer de camoufler les petites imperfections de la cuisson comme le montre l'exemple suivant ( n'hésitez pas, cliquez sur les photographies, ce sera mieux en " plein écran " ) :

Porcelaine de Satsuma Porcelaine de Satsuma

Toutes ces considérations prises en compte, les possibilités décoratives sont presque sans limites mais l'application des divers émaux de couleurs et la réalisation des décors nécessitent d'être pensés à l'avance, dès avant même l'application du bleu de cobalt sous couverte. La réalisation d'un décor polychrome est donc le résultat de nombreuses étapes plus ou moins périlleuses ( comme les cuissons ) ou complexes ( avec l’interaction des motifs en bleu de cobalt que viennent compléter les autres couleurs ). La plus petite pièce à décor polychrome peint à la main prend donc dès lors une dimension toute particulière ...

Porcelaine japonaise ancienne

Porcelaine japonaise ancienne

Porcelaine chinoise ancienne

9 juin 2014

Porcelaine : Les traces d'usure

Le lapin dans la lune

Les traces de manufacturation ne sont pas les seuls traces que l'on observe sur la porcelaine. On peut également y observer des traces d'usures. Celles-ci sont spécifiques aux porcelaines qui prennent de l'âge car elles sont liées à leur utilisation, aux frottements, empilements, chocs, ..., bref, à un usage plus ou moins intensif.

La première grande trace d'usure est très facile à voir et touche un type d'émail en particulier : la dorure. Celle-ci est en effet relativement fragile et résiste mal aux frottements. Les aplats résistent cependant mieux que les ors posés sur les bordures.

Moineau dans une branche

Le lapin dans la lune

Une autre trace d'usure, qui résulte d'un accident puisque engendrée par un choc la plupart du temps, est le fêle. Lorsqu'il est très fin, il prend le nom de "cheveu" mais il s'agit toujours d'un fêle, d'une fêlure. Il se détecte très facilement, en passant la pointe de l'ongle dessus, car on ressent alors l'accroc là où l'ongle devrait glisser. Le même fêle se retrouve également sur les deux faces d'une pièce.

Assiette chinoise 18ème siècle à cerise

Assiette chinoise XVIIIème siècle à cerise

Mais les traces les plus communes sont cependant les rayures de la couverte. Naturellement, plus la pièce de céramique est destinée à un usage courant, plus ces rayures sont censées être nombreuses. Ainsi, en toute logique, les petites coupes, les contenants, bols et assiettes très simples à usage journalier sont théoriquement plus sujets à porter de nombreuses traces qu'une vaisselle de prix très décorée et réservée aux grandes occasions ou que les grandes pièces d'apparat tels que vases ou potiches de décoration. C'est donc ici que la connaissance des formes de la céramique ancienne et des tâches auxquelles étaient destinées ces formes est utile.

Imari chinois

Imari chinois

Imari chinois

Pour repérer au mieux ces traces, on " joue " avec la lumière qui va ainsi permettre de voir les atteintes à la couverte qui apparaissent mates. Ceci est dû à la similitude entre le verre et la couverte de la porcelaine, qui est translucide. Si ces traces sont le résultat d'un usage régulier et répété, elles sont également de formes aléatoires et sont aléatoirement réparties sur l'ensemble de la pièce. Elles ne reproduisent donc normalement pas un schéma répétitif, comme des traces qui auraient été faites volontairement et seulement à certains endroits visibles comme cela se voit parfois pour les faux. C'est la raison pour laquelle l'observation de ces usures apprend un certain nombre de choses à l’œil averti.

Porcelaine chinoise ancienne

Ainsi, entre les traces d'usures, les traces inhérentes à la fabrication des pièces anciennes et les autres contraintes techniques auxquelles étaient soumis les anciens, on comprendra aisément qu'il est assez peu rentable pour d'éventuels faussaires d'essayer de fabriquer des copies de pièces de consommation courante peu raffinées qui se vendront au final  assez mal même à une cinquantaine d'euros au mieux ... dès lors, le moyen le plus courant pour d'éventuels vendeurs de faire passer des pièces récentes pour anciennes est juste de mentir, volontairement ou par ignorance, sur l'âge réel des pièces. Un rapide examen pourra dès lors facilement confirmer ou infirmer une datation ancienne pour de telles pièces, mais les choses commencent à se gâter pour les grandes pièces plus onéreuses ou pour les céramiques de qualité ... à partir de là, comme je l'ai déjà écrit, pour une datation se rajoute toujours une étude du décor, de la forme et de l'éventuelle signature ou de l'éventuelle mention portée sur la pièce qui doivent correspondre à la même époque. Cette étape ci requiert par contre une certaine expertise et une certaine formation et ne s'improvise donc pas.

5 juin 2014

Porcelaine : Les traces de manufacturation

A côté des traces liées à la fabrication de la pâte de porcelaine exposées précédemment, on rencontre diverses traces dues à la manufacturation, qui seront, cette fois-ci, également observables pour les grès. Ces traces, bien souvent involontaires, sont fréquentes dans les porcelaines anciennes car elles sont le résultat de ce que l'on pourrait considérer comme des nécessités techniques impératives pour certaines et plus ou moins comme des accidents pour d'autres.

Les traces de fabrication sont peu nombreuses et essaient toujours d'être les plus discrètes possible le cas échéant. L'artisan essayera en effet toujours, pour des raisons esthétiques et quand les contraintes techniques le permettent, de disposer ces traces au dos d'une pièce ou dans les parties non visibles au premier abord.

Assiette Imari chinois

Voici tout d'abord, bien centrée, la trace laissée par un plot de soutient, que l'on appelle pernette. En effet, plus la pièce est longue ou large, plus elle est susceptible de se déformer lors de la cuisson. On va alors essayer de la soutenir lors de cette cuisson par de petits plots d'argile réfractaire. Le contact de ceux-ci avec l'émail laissera cependant automatiquement une trace visible.

La plus grosse trace de manufacturation est elle aussi généralement située dans la partie non exposée directement à la vue. Là encore, c'est un endroit ou la pièce est posée en contact avec le four ou la caissette de cuisson, le cul de la pièce, la base sur laquelle elle reposera également par la suite lors de son utilisation.Ici aussi , donc, la couverte ne peut donc pas tenir.

Assiette Imari chinoise

Ces deux types de traces sont plus ou moins volontaires, ou du moins prévisibles dès la conception de la pièce. Mais une dernière trace de manufacturation peut également se croiser sur les pièces anciennes de "grande série" produites pour des utilisations quotidiennes ou presque. Cette trace ci résulte d'un "accident" et n'est pas voulue : l'agrégat de sable.

Dans les fours où la cuisson se fait au bois, le sol est généralement en terre ou en briques réfractaires. Mais il arrivait également que le sol du four soit tout simplement recouvert de sable. Pour faire court, le sable est majoritairement composé de silice qui sert à fabriquer le verre si on lui adjoint un fondant qui va faire baisser sa température de fusion et de vitrification. Le sol en sable du four ne risque donc pas de fondre pour se transformer en verre, mais il arrive que sous les variations de température se forment, sous certaines pièces mises à cuire sur ce type de "sol", des agrégats de sable qui vont coller et se fondre à la couverte.

Bleu de Hué

Après les traces dues à la manufacturation, on rencontre deux types de traces "accidentelles" induites spécifiquement par la cuisson au bois et ses variations de température lorsqu'elle est inégalement maîtrisée. On les rencontre donc essentiellement sur les céramiques anciennes et sont considérées comme des défauts mais sans gravité.

Tout d'abord, la trace la plus courante est le fêle sous couverte. Ce type de fêlure se produit lorsque la porcelaine non encore totalement cuite se contracte / rétracte pendant cette cuisson suite à une variation de température. De tailles variables, ces fêles sont cependant comblées en totalité ou en surface par la couverte car la cuisson n'est pas terminée au moment de leur formation et on pourra donc les différencier facilement d'un fêle résultant d'un choc, car en passant l'ongle dessus, on sent bien qu'elles n'accrochent pas et semblent "lisses" au toucher. Cependant certains fêles sont parfois trop importants et les tensions mécaniques sur la pièce lors de la cuisson vont entrainer la cassure totale de cette dernière.

fêlure ou fêle dans la porcelaine

fêlure ou fêle dans la porcelaine

Le deuxième accident de cuisson est lui purement esthétique : le retrait d'émail de décoration. Ce retrait se produit lors de la seconde cuisson qui sert, comme on peut le deviner, à fixer les émaux sur couverte qui servent à décorer une pièce de céramique. Comme son "confrère" de la première cuisson, ce type de retrait se forme lors d'une cuisson mal maîtrisée :

Assiette Imari chinoise

L'émail se rétracte alors et forme soit des bourrelets ( flèches rouges ) soit un renforcement de l'épaisseur de l'émail dans certaines zones, laissant des blancs dans d'autres ( flèches bleues ). Comme il s'agit techniquement d'une couverte secondaire placée au-dessus de la première couverte, l'intégrité physique de la pièce n'est jamais mise en cause ... par contre, la deuxième cuisson nécessaire pour fixer cet émail de décoration entraine la cassure de pièces fragilisées par un fêle sous couverte trop important, mais c'est un autre sujet ...

Assiette Imari chinoise