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30 avril 2016

Nodate

chanoyu nodate

Le Chanoyu Nodate est une cérémonie qui se tient hors d'un pavillon de thé, juste à l'extérieur, dans le jardin ou en pleine nature. Cette cérémonie de thé "champêtre", qui se tient généralement les beaux jours, au printemps ou en automne, peut prendre plusieurs aspects, plus ou moins formels.

Le Chanoyu Nodate le plus formel prend place sur une petite estrade rectangulaire qui rehausse l'officiant de quelques centimètres par rapport au sol. Cette estrade est recouverte d'un tissus rouge sur toute sa surface, l'officiant étant plus ou moins symboliquement protégé des éléments par un parasol de papier laqué de rouge maintenu par un pied en bois. L'estrade est fermée sur deux côtés par un dais formant paravent qui sert à délimiter l'espace. Les invités font face à l'estrade sur le côté principal et sont généralement assis sur des bancs, eux aussi tendus de rouge. La cérémonie est réduite à la prise du thé et d'une confiserie pour être centrée sur l'appréciation de l'agencement du jardin et / ou de la nature. Dans ce type de cérémonie, les instruments habituels du Chanoyu sont généralement utilisés, Furogama compris.

Il existe également des pratiques moins formelles qui nécessitent moins de préparation, mais qui comprennent tous les ustensiles du Chanoyu jusqu'au Kogo, ces ustensiles étant rangés dans une boite rectangulaire en bois laqué, qui permet de réaliser des cérémonies nécessitant également un Furogama, mais avec moins de cérémonial que pour le Chanoyu décrit ci-dessus.

Il y a enfin des ensembles qui permettent l'emploi d'un matériel spécifique, c'est-à-dire "portable", qui est donc adapté à ce type d'emploi. On trouve ainsi tout les ustensiles habituellement au centre du Chanoyu, mais avec une taille particulière, c'est-à-dire nettement réduite.

Le Chawan Nodate est donc nettement plus petit qu'un Chawan de taille normale :

chawan portable blog sur le thé

Forcément, pour battre le Matcha dans un aussi petit bol à thé, il faut un Chasen de taille adaptée :

chasen pour cérémonie du thé d'extérieur

Un Chashaku de même taille réduite va également avec cet ensemble :

blog sur le thé

Mais ce ne sont pas là les seules adaptations de ces ustensiles pour tenir une cérémonie du thé d'extérieur, car ce matériel est conçu pour prendre le moins de place possible et tenir dans une gaine de rangement et de protection. Le manche du Chasen est ainsi évidé pour permettre le rangement de la cuillère à thé :

club thé chashaku nodate
blog de thé blog thé

Un Natsume adapté fait aussi partie de l'ensemble, toujours de taille réduite bien entendu.

cérémonie du thé nodate cérémonie du thé d'extérieur

Le tout tient ainsi dans un espace réduit au strict minimum et pourtant très fonctionnel qui fonctionne tout aussi bien pour l'Usucha que pour le Koicha et qui permet de prendre son Matcha virtuellement n'importe où, pour peu que l'on se charge en plus d'un thermos d'eau chaude.

blog sur le thé

18 avril 2016

Thé et mobilier

kannon dansu

Si les ustensiles pour le thé sont nombreux, il n'en est pas de même pour les meubles dédiés au thé, que ce soit dans la sphère culturelle japonaise ou dans la sphère culturelle chinoise, qui sont relativement peu nombreux ... si peu nombreux en réalité, qu'on peut les compter sur les doigts d'une main.

Les meubles japonais

Cha-dana, Kazari-dana ou Fukuro-dana

Ce type de meuble remonterait au XIVème siècle et à pour origine de simples étagères droites. Ce meuble rappelle aussi les étagères fixes (Chigai-Dana) du Tokonoma des pièces de style Shoin.

On peut trouver ce type d'étagères en deux grandes déclinaisons. La première est assez simple dans sa structure et se compose généralement de deux ou trois étagères. Ce modèle relativement simple et de petite taille, parfois muni d'un tiroir ou de portes coulissantes, est utilisé pour la cérémonie du thé. On y pose généralement Shakutate et Mizusashi.

chadana
Photographie © Ebay.Inc
cha dana
Photographie © Ebay.Inc

fukurodana
Photographie © Chanoyu to wa
fukuro dana
Photographie © Chanoyu to wa

La deuxième déclinaison de ce type d'étagères a des dimensions plus conséquentes et ne sert pas pour le Chanoyu mais est placée dans la pièce de réception principale (Zashiki) ou dans des pièces d'usages plus restreints. On peut à la fois y poser des objets pour le thé, mais également des objets de décoration. Les espaces de rangement derrière des portes coulissantes et des tiroirs y sont plus nombreux, ce qui en fait également un meuble de stockage, au décor variable, plus ou moins chargé.

kazaridana
Photographie © Kazari + Ziguzagu
kazari dana
Photographie © Kazari + Ziguzagu

Cha-Dansu

cha dansu
Photographie © Schelma.com, Bruxelles

Intégralement destiné au thé, le Cha-Dansu ou Cha-Tansu apparait à la fin de la période Edo. Il ne s'agit au départ que d'un version plus petite des Mizuya-Dansu (les Tansu destinés à stocker ustensiles, céramiques et parfois denrées alimentaires destinés à la cuisine). Il est partiellement l'héritier des étagères fixes (Chigai-Dana) que l'on pouvait trouver dans certaines pièces de réception pourvues d'un Tokonoma. Le thé s'étant plus largement répandu avec la prospérité de l'ère Edo, ce type de Tansu est généralement placé dans la pièce principale de la maison (Zashiki) qui est aussi la pièce de réception. Le thé y devient un support de sociabilité ou un lien pour les rapports commerciaux ou administratifs.

meuble pour le thé
Photographie © Primitive. Living + Collecting, Chicago

A la fin de l'ère Meiji,apparaissent les Cha-Dansu munis de portes vitrées, les premières feuilles de verre étant distribuées au Japon par la Asahi Glass Company établie dans la Préfecture de Hyogo. L'usage du verre se répand à partir de cette date puis pendant l'ère Taisho.

tansu pour le thé
Photographie © Ebay.Inc

Alors que les Cha-dansu de l'ère Edo sont relativement sobres et ont généralement des étagères relativement simples car cachées, l'usage du verre voit se répandre l'usage des étagères décoratives décalées (Chigai-dana) que l'on trouve dans le Tokonoma, l'usage du verre permettant de montrer les céramiques de valeur du propriétaire du lieu.

Les meubles chinois

Sièges et tables à thé

Si les meubles japonais dédiés au thé sont peu nombreux, les meubles chinois le sont encore moins, le seul meuble réellement consacré au thé venant se placer entre deux sièges ou à côté de chaque personne si deux individus se font face.

table chinoise pour le thé

Ces tables sont pourvues d'un piètement entre leurs jambes et parfois d'une étagère intermédiaire. Ici aussi, le thé est un support de sociabilité ou un lien pour les rapports commerciaux ou administratifs et ces tables viennent s'insérer à hauteur d'appui.

table chinoise pour le thé

Les tables peuvent aussi servir de support pour une jardinière, un brûle-parfum ou un objet décoratif. Elles n'ont également qu'un rôle d'appoint pour les hôtes ayant droit de s'asseoir sur une chaise ou un fauteuil ...

Car en Chine, on ne s'assied pas n'importe où, et qui vous êtes hiérarchiquement va définir votre place et le type de siège sur lequel vous allez vous assoir. Ainsi, le maître de maison est généralement placé sur un lit de jour, banquette assez large, où il aura une petite table d'appoint pour le thé. Il s'agit de la place d'honneur, la plus importante, toujours située en face de l'entrée, au milieu du mur. Si l'on est assez important, on pourra venir s'y assoir à côté de lui, le lit de jour étant généralement assez long pour permettre à deux personnes de s'y asseoir côte à côte. Ensuite, plus on s'éloigne, plus son rang baisse, et l'on passe des fauteuils aux chaises puis aux tabourets ... jusqu'à rester debout, le cas échéant. Les invités placés à l'Est sont par ailleurs plus prestigieux que ceux placés à l'Ouest.

meuble chinois ancien

La forme du siège va également changer en fonction de votre statut. Les fauteuils au dossier en forme de fer-à-cheval sont destinés aux invités les plus prestigieux. Pour les autres formes de fauteuils ou de chaises, les hommes ont droit à un dossier haut et incurvé, plus confortable car il permet de laisser les épaules se relâcher tandis que les femmes ont droit à un dossier bas et rectiligne, qui oblige à garder les épaules droites et le torse légèrement bombé, pour les obliger à garder une pose bienséante.

meuble chinois ancien

Par ailleurs, se voir attribuer un banc ne signifie pas pour autant qu'il va falloir le partager avec d'autres, la place libre permettant, le cas échéant d'y poser des objets. Les tabourets, enfin, sont eux aussi composés pour permettre une hiérarchie en fonction de leur taille et de leur hauteur.

On le voit, le nombre de meubles destinés au thé, que ce soit en Chine ou au Japon sont donc plutôt limités et peuvent même ne pas être totalement dédiés au thé tant leurs usages peuvent être variables.

14 avril 2016

Histoire du Thé et du Chanoyu au Japon : Architecture, structure sociale et mutations des usages

kyoto

On peut considérer le Chashitsu comme l'expression la plus tangible de la place du thé dans la société japonaise féodale et effectivement, il arrive que cet élément architectural marque l'espace de façon prépondérante, comme dans le jardin de cette maison de Kyoto, où l'on peut trouver trois Chambres de thé à flanc de colline, toutes différentes dans leur conception. 

kyoto

Le Chashitsu du premier plan est ainsi une illustration du type Soan, au toit de chaume et aux petites ouvertures, le Chashitsu du deuxième plan laisse, lui, plus de place à la lumière tout en conservant encore un plan simple, tandis que le dernier, caché dans les frondaisons, plus luxueusement construit tout en restant assez simple, a un toit de tuiles. La construction à flanc de colline et sous un arbre dominant les autres n'est pas non plus un hasard mais constitue une référence directe aux anciens ermitages de l'époque Kamakura, montrant que le propriétaire connaissait ses classiques littéraires.

kyoto

Nul doute que le propriétaire de ce jardin était plutôt riche et plutôt attiré par le Chanoyu qui est par ailleurs, dans l'imaginaire collectif, bien souvent associé aux guerriers japonais, samouraïs de rang moyen ou Daimyo ... Nous ne sommes pourtant pas là dans la demeure d'un seigneur ou d'un guerrier, mais dans celle d'un riche marchand d'encens.

Structuration sociale et propagation du thé

histoire du japon et des japonais reischauer
La structure sociale sous le shogunat des Tokugawa in REISCHAUER ( Edwin O. ), Histoire du Japon et des Japonais. Tome 1. Des origines à 1945, Éditions du Seuil, Paris, 1973.

La structure sociale féodale japonaise est inspirée des théories sociales confucianistes. La place sociale des artisans est ainsi inférieure à celle des paysans, les marchands étant considérés comme des improductifs et situés au plus bas de l'échelle. De là, l'importante place des marchands sur la vie économique mais aussi culturelle du Japon est alors largement éludée de la littérature, au moins francophone, sur le Chanoyu, et ne parlons pas du net, qui reprend généralement tous les poncifs sur l'introduction du thé au Japon par les moines revenus de Chine et sur "l'appropriation" de la cérémonie du thé par les élites guerrières.

Certes, selon la légende, revenant de Chine, Eichu ( 743 - 816 ) serait le premier à apporter le thé au Japon. De même, Saicho ( 767 - 822 ), fondateur du courant Tendai également appelé École du Sutra du Lotus, branche du bouddhisme Mahayana, serait aussi le premier à apporter le thé au Japon. Kukai ( 774 - 835 ), fondateur du Bouddhisme Shingon, serait aussi le premier à apporter le thé au Japon. Plus tard, Myoan Eisai ( 1141 - 1215 ), fondateur de l'École Rinzai, une branche du bouddhisme zen japonais, aurait rapporté le Matcha de Chine, tandis que Eihei Dogen (1200-1253), fondateur de l'École Soto, une autre branche du bouddhisme zen japonais, aurait lui rapporté bon nombre d'ustensiles, toujours de Chine, Myoe Shonin ( 1173 - 1232 ) quand à lui, plantant le premier jardin de thé du Japon au sud-est de Kyoto, à Uji. De la même façon, on ne peut non plus nier que l'étiquette du Chanoyu faisant partie de l'éducation du guerrier idéal au même titre que l'art de la poésie ou le savoir littéraire, les samouraïs ou Bushi s'investissent dans cette pratique. Mais c'est oublier que les moines sont plus des vecteurs de diffusion d'idées que de réels logisticiens du transport de céramiques et de thé. C'est oublier que la première mention d'un Chagi, une cérémonie où du thé est offert aux participants, qui se tient à la cour impériale, date de 729, ce qui signifie que l'usage du thé était déjà connu et usité avant cette date et que la recherche archéologique a trouvé des graines de thé à Shizuoka datant de la période Yayoi ( -300 - 300 ). C'est également oublier que l'idéal d'un guerrier "complet", qui ne doit pas savoir seulement manier l'arc et le sabre mais qui doit aussi maîtriser le pinceau, se fait peu à peu jour aux prémices du XVème siècle seulement pour devenir une norme au début du XVIIème siècle avec la pacification des Tokugawa.

Mais le passage du Shoin au Soan n'est pas le fait de moines ou de guerriers, et est plus dû à l'influence directe de marchands prospères, tout comme la diffusion des objets pour le thé originaires de Chine, la diffusion par la suite d'objets du thé fabriqués au Japon, la transformation de la cérémonie du thé

On trouve ainsi, dans l'architecture, la trace du passage des modes, parfois condensé dans un espace restreint comme au Kinkaku-ji à Kyoto, où à quelques encablures du pavillon qui attire les visiteurs, se tient un petit Chashitsu qui est un bel exemple du style Soan et qui, à côté du Kinkaku, couvert d'or comme son nom l'indique, accentuant d'autant le contraste, fait plus penser à une masure qu'à une chambre pour le thé.

pavillon d'or kyoto

kyoto chashitsu chashitsu soan
chashitsu chanoyu

Le rôle des grands marchands et l'essor du Chanoyu

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Portrait de Sen No Rikyu par Hasegawa Tohaku, calligraphie par Shun'oku Soen, XVIème siècle. Photographie © Fondation Omotesenke Fushin'an

Si beaucoup de monde connait Sen No Rikyu ( 1522 - 1591 ), peu de monde connait Tsuda Sogyu ( † 1591 ) et Imai Sokyu ( 1520 - 1593 ). Pourtant, ils étaient tous les trois installés à Sakai, étaient tous trois des fils de marchands importants, étaient eux-mêmes des marchands prospères et furent tous trois les maîtres de thé ( Chato ) en charge du Chanoyu pour Oda Nobunaga puis pour Toyotomi Hideyoshi.

Il ne tirèrent pas non plus leur savoir de leurs seules expériences. Tsuda Sogyu suivi l'enseignement de son père, Tsuda Sotatsu ( 1504 - 1566 ) qui maîtrisait déjà le Chanoyu et est l'auteur initial des Tennojiya Kaiki ( Annales des rencontres de thé ) en 1548. Imai Sokyu et Sen No Rikyu furent les disciples de Takeno Joo ( 1502 - 1555 ), riche marchand de Sakai, qui leur enseigna le Chanoyu et occupa une place importante dans leur apprentissage, Imai Sokyu épousant même la fille de Takeno Joo.

Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si tellement de maître du Chanoyu sont alors originaires de Sakai, car c'est dans ce lieu que ce type de cérémonie est alors en vogue, tandis que d'autres types de cérémonies plus formelles sont en vogue à Kyoto. On y pratique ainsi le cérémonie du thé Yotsugashira, littéralement la cérémonie des Quatre Têtes, c'est-à-dire la cérémonie des Quatre Honorés. Celle-ci est clairement d’inspiration chinoise par son organisation, les convives, assis sur des fauteuils, étant répartis de part et d'autre de la salle, autour d'un axe central marqué par un autel.

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Cérémonie du thé Yotsugashira. Croquis © Marc Peter Keane / Stone Bridge Press in KEANE ( Marc Peter ), The japanese tea garden, Stone bridge press, Berkeley, 2009.

Dans cette cérémonie, le mobilier et les ustensiles sont également d'origine chinoise, ce qui correspond au goût d'alors, signe d'une culture Lettrée qui trouve une bonne par de ses racines en Chine, mais qui est aussi une certaine recherche de la complexité et peut être aussi de l'ostentation, pas parce que les objets chinois sont nécessairement sur-décoré, mais parce que provenant de loin, ils sont relativement coûteux, Kyoto concentrant par ailleurs une bonne part de riches nobles. Ainsi, lorsque la mode change à Kyoto et se tourne vers le Chanoyu, plus axé sur la simplicité et le dépouillement, c'est tout naturellement vers Sakai que se tournent les puissants que cette nouvelle mode intéresse.

L'histoire de l'établissement du Chanoyu tel qu'on le connait actuellement est elle aussi plus compliquée et plus protéiforme que l'on peut couramment le lire. Si Sen No Rikyu en est une figure centrale pour son travail de codification et de transmission, on a un peu trop vite oublié Murata Juko ( 1423 - 1502 ), lui aussi un marchand, qui est l'inventeur du Chanoyu et de la chambre de thé de 4 tatamis et demi chère à Sen No Rikyu. Murata Juko laissa également un écrit majeur du Chanoyu, le Kokoro no fumi, c'est-à-dire la Lettre du cœur, mettant l'accent sur la simplicité tout en ne condamnant pas les objets de prix mais prônant une sorte d'harmonie, et ce n'est donc pas par hasard qu'il reçu le soutient de divers protecteurs dans la petite noblesse, aux moyens relativement modestes, comme Furuichi Choin ( 1452 - 1508 ) qui sera son disciple et développera lui, avec son frère Furuichi Choei, le Rinkan Chanoyu, sorte de Chanoyu qui intègre le bain collectif dans sa pratique ! Enfin, c'est également du fait de Murata Juko que le Chanoyu est fortement influencé par le Zen, ayant reçu l'enseignement de Ikkyu Sojun ( 1394 - 1481 ). Takeno Joo s'inspirera ensuite des écrits de Murata Juko, et jouant le rôle décrit un peu plus haut ...

Ainsi, le Chanoyu, s'il gagne une place prépondérante dans les habitudes par l'intérêt que lui porte Oda Nobunaga puis Toyotomi Hideyoshi, a été pensé bien en amont par un groupe social initialement considéré avec un certain dédain tout en étant largement sollicité et utilisé par les classes dirigeantes. Les marchands n'y perdent d'ailleurs pas au change, trouvant par là une certaine ascension sociale, les classes n'étant pas aussi rigide que l'on peut le penser, le meilleur exemple étant justement Sen No Rikyu, qui était samouraï, comme le prouve sa mot, ayant reçu la faveur de faire Seppuku.

L'omniprésence du Chanoyu

Le Chanoyu va ensuite gagner une place prépondérante, si bien qu'il va éclipser toute autre forme de cérémonie du thé dans l'imaginaire collectif jusqu'à y devenir La cérémonie du thé japonaise, à l'exclusion de toutes les autres.

Le Chanoyu impacte aussi rapidement les décors que l'on peut trouver au sein même de la maison japonaise. Comme toujours dans celle-ci, rien de directement ostensible, mais tout est dans les détails minimes, comme les Hikite, poignées de cloisons coulissantes.

chanoyu

On retrouve ainsi, pour qui sait voir, habilement dispersés, Kama, Kan, Chasen, Gotoku, Furogama, Natsume, Chashaku, Hishaku, Futaoki, Haboki, Haiki, ..., que l'on retrouve au sein des Hikite ou encore inscrits en négatif sur les Ranma, certains éléments de décors devenant parfois prisés et reproduits dans des catalogues de modèles pour charpentiers et ébénistes.

chanoyu

9 avril 2016

Au bout du rouleau ...

Grues et tortues japonaises

Au bout du rouleau, Kakemono ou Kakejiku, il y a généralement un nœud qu'il convient de refaire après avoir dépendu le rouleau servant de support à l’œuvre picturale. Assez simple à réaliser, la marche à suivre pour faire ce nœud est pourtant largement méconnue ...

poids pour rouleau de peinture asiatique

Tout d'abord, on enlève les éventuels Fuchin, poids servant à lester les rouleaux peints. L'objet devient également un élément de décor à part entière, que l'on peut accorder au thème pictural du Kakejiku ou encore à l'un où l'autre élément du montage.

hanging scroll weights

Poids, forme, décor, matière, longueur et couleur du nœud support, ..., les possibilités de variations sont infinies.

Mais rentrons dans le vif du sujet !

Si votre rouleau est muni de Futai, bandelettes destinées à faire fuir oiseaux et insectes en frappant le support au moindre coup de vent, il faut les replier. C'est assez facile, l'un passe sous l'autre, juste sous le Kan, la baguette supérieure sur laquelle sont fixés les Futai, et le Takuboku, le ruban de fixation, qui est formé du Kakeo (le ruban directement attaché au Kan) et du Makio (le ruban pendant attaché au Kakeo).

Kakejiku

Futai

japanese hanging scroll

Une fois cette opération réalisée ou s'il n'y a pas de Futai comme, par exemple, pour les montages de style Fukuro (les peintures chinoises ou de style chinois sont le plus souvent montées ainsi) ou Kirinuki Hyogu (la monture étant constituée d'une pièce de soie d'un seul tenant), on referme le rouleau en douceur. On enroule ensuite le Makio trois fois autour du rouleau replié. Pour ce faire, on décale légèrement le Makio vers la droite, puis on tourne celui-ci doucement autour du rouleau en maintenant le ruban plat et en plaçant les bandes les unes à côté des autres, sans interstices entre elles, comme illustré sur la photographie ci-dessous.

kakejiku

Les trois tours faits, on passe ensuite le Makio sous le Kakeo :

Kakeo

Puis le bout du Makio passe sous le Kakeo, formant ainsi une boucle :

Kakejiku

Cette boucle est relativement lâche et on s'applique à ce qu'elle soit la plus plate possible :

rouleau japonais

On passe ensuite cette boucle sous le Kakeo et on tire doucement sous les deux extrémités pour solidifier l'ensemble :

kakemono

kakemono

Le rouleau est désormais fermé, le nœud est terminé. On remarquera qu'il s'agit d'un genre de nœud plat qui n'entraine donc pas de réelle pression pour le rouleau de peinture et qui ne compresse pas non plus le-dit rouleau s'il a été correctement réalisé, c'est-à-dire sans tension lors de la réalisation du nœud.

Le cas échéant, on replace ensuite le rouleau dans son Tomobako de rangement et de protection. On respecte le sens de placement, aisément repérable par l'asymétrie des supports.

pauwlonia box

boite de rangement en pauwlonia

Ici, le nœud va également servir, empêchant le Kakejiku (ou Kakemono) de tourner sur lui-même en servant de cale contre le bord du Tomobako.

kakemono

Ne reste plus qu'à fermer le couvercle du Tomobako et à stocker le tout loin de sources d'humidité et du soleil direct.