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24 décembre 2014

Collections ...

boites à encens en céramique

Les Kogo et les Futaoki sont certainement les objets les plus anodins, les moins connus et les moins remarqués de la panoplie du Chanoyu ... après tout, ils sont largement cachés aux yeux des invités sous le couvercle du Kama ou sous l'Hishaku, quand ils ne sont pas tout simplement escamotés avant même l'arrivée des invités.

A la différence des Chawan, ils ne jouent donc pas un rôle central mais sont pourtant l'objet d'attentions toutes particulières de la part de ceux qui les ont conçus. Kogo et Futaoki sont en effet un excellent support pour la créativité des potiers japonais, tant sur le plan de la forme et de la recherche esthétique que sur le plan technique avec l'immense gamme de couvertes qu'il est possible d'utiliser.

kogo en raku yaki
Kogo Raku Yaki en forme de coq, symbole de bonheur
kogo en mino yaki
Kogo Mino Yaki en forme de Mizusashi

Qu'il représente un symbole auspicieux comme le coq ou un objet usuel du Chanoyu comme un Mizusashi en passant par des formes plus abstraites, le kogo est l'occasion, pour le potier japonais, d'exprimer son interprétation d'un élément de culture, comme avec l'exemple du lapin / lièvre, qu'il soit relativement stylisé, très réaliste comme celui de Konishi Toko en Bizen Yaki, copie réinterprétée d'une forme ancienne représentant le Lapin dans la Lune ou encore d'une totale fantaisie comme le lapin-gâteau Mochi ci-dessous ...

le lapin dans la lune
De gauche à droite, lapins en : Hagi Yaki, Shigaraki Yaki, Raku Yaki, Kyo Yaki, Hagi Yaki et Bizen Yaki

Les Futaoki relèvent plus ou moins de la même logique, même si la plupart sont tous plus ou moins dérivés d'une même base, celle d'un tronçon de bambou, que certains reprennent même plus ou moins littéralement.  

thé et céramique

Ainsi, si certains Futaoki se "limitent" à reproduire en céramique la forme du bambou de manière, là encore, plus ou moins stylisée, on retrouvera également des formes d'objets courants comme les bobines pour filer, les grelots ou les éventails.

real tea addict
Une forme simple du Futaoki : le tronçon de bambou

On trouve aussi des formes spécifiques développées pour le Chanoyu comme les Futaoki en forme de crabes, en forme de Gotoku ( trépied pour poser une bouilloire sur le feu ), en forme de coquillage, en forme de ronde composée de trois enfants ou encore en forme de personnage penché au-dessus de la margelle d'un puits.

bizen yaki toho kimura pelote à filer japonaise
bizen yaki toho kimura bizen yaki toho kimura

Avec ces deux types d'objets, se rejoignent deux extrêmes : la plus totale simplicité d'une part, car les Kogo les plus simples sont formés d'un coquillage ou d'une pierre et les Futaoki les plus simples sont formés d'un morceau de bambou ou d'un poids à filet en céramique ... et la plus extravagante complication d'autre part, car pour les Kogo et les Futaoki, les seules limites à ce que peut réaliser un potier sont son habileté technique et son imagination ... ainsi, certains potiers poussent même le réalisme à faire des grelots capables de sonner réellement, à l'instar des vrais ...

10 décembre 2014

Hohin

thé et céramique
 
Le Hohin est une théière japonaise sans manche pourvue d'un système de filtration. Bien que l'on puisse l'utiliser avec de l'eau à ébullition, l'absence de manche complique tout de même la chose et c'est plutôt un instrument réservé à des températures d'infusion plus faibles.

théière japonaise

Le système de filtration, qu'il soit constitué de trous percés directement dans la paroi ou qu'il s'agisse d'une pièce rapportée comme sur le deuxième Hohin ci-dessus en partant de la gauche, permet d'infuser efficacement des thés très fragmentés. De plus, avec son bec large, la verse est relativement rapide.

L'ensemble de ces caractéristiques fait souvent penser que ce genre d'instruments a été créé uniquement pour les Gyokuro, mais force est de constater que selon la forme ( bords détachés comme sur le deuxième Hohin à partir de la gauche sur la photographie ci-dessus ) ou avec la présence de galets éloignant les doigts de la paroi ( comme pour le premier et le deuxième Hohin à partir de la gauche sur la photographie ci-dessus ), on peut utiliser ce type d'ustensile sans problème même avec des températures allant jusqu'à 80° Celsius.

thé et céramique

Cet instrument est relativement courant au Japon même s'il est peu usité sous nos contrées et se trouve généralement inclus dans un set composé d'un Hohin, d'un Yuzamashi et de tasses à thé. On le trouve également dans une multitude de styles de la céramique japonaise, que ce soit en porcelaine ou en grès.

thé et céramique

Enfin, si la plupart sont généralement simples, cet ustensile du thé est également parfois un support d'expression pour le modelage, bien plus souvent que les Kyusu par exemple, et que ce soit pour le corps du Hohin ou juste pour le bouton de son couvercle, les formes les plus étranges font ici parfois leur apparition.

20 novembre 2014

Choisir une théière de Yixing : les pièges faciles à éviter

théière en terre de Yixing pour gongfucha ou gong fu cha

Le néophyte confronté à l'achat de sa première théière de Yixing est souvent taraudé par la même question : " Est-ce que ce que j'envisage d'acheter est de bonne qualité ou non ? " Il est à la fois difficile et facile de répondre à cette question car elle se rattache à la question " Suis-je en train de me faire avoir ou pas ? " ... 

... difficile car à partir d'un certain niveau de prix, la qualité de l'exécution fait que l'on rentre dans un monde "d'experts" et que les questions tournent alors plutôt sur le type de terre utilisée, si c'est bien la terre mentionnée qui est effectivement utilisée, sur le fait que l'objet ait été réalisé entièrement à la main ou non et enfin s'il s'agit bien d'une antiquité ou non ... ce ne sera pas le sujet de ce post qui sera déjà bien assez long comme cela ...

... facile en même temps, car il est aisé d'éviter les pièges les plus grossiers, à condition de faire montre de deux sous de jugeote, ce qui permettra d'éliminer un nombre incalculable de théières dites " de Yixing " très bas de gamme ou de fausses théières " de Yixing " ...

Entendons-nous tout de suite, il ne s'agit pas uniquement d'une question de prix ... cela veut dire que l'on trouvera facilement des choses innommables à des tarifs extrêmement élevés. Cela veut aussi dire que l'on peut trouver des théières tout à fait acceptables à des prix raisonnables voire modiques ... encore faut-il avoir ouvert un minimum les yeux et prendre le temps de réfléchir deux secondes ... par "acceptables", je veux désigner des théières qui pourront être utilisées sans poser de problèmes en terme de manipulation et qui ne soulèvent pas de questions plus épineuses ...

En premier lieu, il est une question absolument nécessaire qu'il est essentiel de se poser : " Quel thé vais-je y infuser ?  " ... car si une théière de Yixing doit être "idéalement" destinée à l'infusion d'une unique famille de thé - même si cela est peut être discutable, mais c'est un autre sujet - encore faut-il savoir quelle famille de thé y infuser ... et autant être franc, inutile de dépenser des fortunes en théières pour y infuser du Puerh Shu ... par contre, cela sera peut être plus intéressant pour un Wulong de qualité ou un Puerh Sheng ...

Laissez moi tout d'abord vous présenter une de mes premières théières justement achetée, après une longue hésitation et moult réflexion, car peu onéreuse, c'est-à-dire à peu près 40 €, frais de port inclus depuis l'autre bout de la planète ...

théière pour gongfucha

Il s'agit d'une théière de Yixing de forme Xishi. Elle n'a rien d'exceptionnel, elle ne transforme pas le thé médiocre en grand cru rare, elle n'est pas l’œuvre d'un grand maître ... elle fait avant tout son travail, comme le ferait un gaiwan ou un zhong en porcelaine, même si je trouve qu'elle a tendance à lisser les arômes de cave humide ... quoi qu'il en soit, pour y préparer des Puerh Shu, c'est bien suffisant ... ce qui fait que son seul vrai avantage est d'être, point commun de toutes les théières, pratique d'usage, et seulement cela.

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Cependant, même à ce prix elle est exempte de nombreux défauts de fabrication qu'il est facile d'éviter ... signes d'une qualité médiocre que je vais maintenant détailler ci-dessous ...

  • Les traces de moulage

Tout d'abord, cette dernière théière est exempte de traces de moulage visibles, ce qui signifie, alors qu'elle sort bien évidemment d'un moule, qu'il s'agit sans aucun doute d'une production en série et qu'elle n'a donc pas été réalisée " entièrement à la main ", qu'un certain soin lui a tout de même été apporté pour y gommer les traces les plus perceptibles de ce moulage ...

Les traces de moulage se trouvent généralement sur le milieu du corps, cette partie de la théière étant le plus souvent moulée en deux parties. Outre la partie soulignée en rouge ci-dessous, la plus difficile à voir, un œil attentif verra comme un accroc sur le bec ... c'est un autre signe de moulage, plus visible celui-ci ...

gongfucha
Photographie © Jiangtea Ltd
gongfucha
Photographie © Jiangtea Ltd

Détail insignifiant me direz-vous ? Pas vraiment ... c'est ici qu'entrent en ligne de compte les processus de fabrication ... car si aucun soin particulier n'est apporté à un objet de la sorte lors de sa fabrication, c'est que l'ouvrier ( car on ne peut plus parler d'artisan ici ) est pressé de produire, étant sans aucun doute payé à façon, c'est-à-dire à la pièce, et n'allant donc pas perdre de l'argent en fignolant plus que nécessaire un produit conçu dès l'origine comme bas de gamme puisque confié à une personne peu qualifiée ... et si l'ouvrier est peu payé pour produire un objet à la chaine, il y a fort à parier que l'entrepreneur qui commande ce type de théière ne sera pas près à payer non plus pour une terre de qualité acceptable ... dès lors, autant infuser son thé dans un pot de fleur, le résultat sera le même et l'objet se trouve facilement dans toute bonne jardinerie pour 4 ou 5 euros ...

On mettra dans cette même catégorie le soin apporté au travail sur la jonction entre le bec et le corps de la théière ainsi qu'au soin pour la jonction entre le bec et le corps de la théière .. ou encore la finesse de l'anse, le soin apporté au bouton, etc, bref, à toutes les finitions qui donnent une ligne harmonieuse à une théière ...

  • L'alignement bancal

En deuxième lieu, vient un autre problème révélateur d'une fabrication à la chaine peu soucieuse de la qualité du résultat final, à savoir un mauvais alignement, déjà un peu plus dur à voir ... A première vue, la théière ci-dessous n'a aucun problème, elle ne semble pas avoir de défaut et parait toute simple ...

gong fu cha
Photographie © Ebay Inc

Pourtant, elle a aussi un problème, issu d'un processus de fabrication bâclé. Une fois le corps assemblé, le potier vient y fixer l'anse et met en place le bec. Si le potier n'est pas assez adroit, si le séchage est insuffisant ou si la cuisson est mal maîtrisée, il va se produire un petit défaut d'alignement, comme on peut rapidement s'en rendre compte ci-dessous.

gongfucha
Photographie © Ebay Inc

Ainsi, en traçant une droite partant du milieu de l'anse et passant par le milieu du bouton du couvercle, on doit plus ou moins tomber au milieu du bec ... et cela même si la théière a été entièrement moulée ... donc, là encore, ce défaut est majoritairement le révélateur d'une fabrication à la chaine par un ouvrier peu doué  ou peu  intéressé par sa tâche ... même si ce dernier défaut peut encore passer à condition de ne pas être trop marqué ...

  • Le filtre raté

La facture du filtre est aussi un élément très éclairant sur le niveau de qualité de la théière. Je n'aborderai pas ici les différents types de filtres, ce sera fait dans un article consacré. On notera cependant qu'après la mode des filtres dits " balle de golf ", c'est désormais les filtres à trou unique qui sont en passe de devenir à la mode car plus faciles à réaliser ... par contre, je soulignerai ici des différences révélatrices, en particulier sur les filtres " balle de golf "...

terre de yixing

La photographie devrait se passer de commentaire mais on peut faire les remarques suivantes : A gauche, il s'agit du filtre de la théière réservée au Puerh Shu déjà présentée ci-dessus ... à droite, une théière valant près du double, soit à peu près 70 € à l'époque de son achat. Les filtres balles de golf sont toujours réalisés sur gabarit, mais la régularité des trous et la finition générale de ce type de filtre est essentielle, notamment pour une bonne verse ... si le filtre à peu de trous, si les trous se rejoignent partiellement, si le filtre est en partie cassé, cela est révélateur d'un manque de soin ... comme la fabrication de ce type de filtres est chronophage, plus une théière sera bas de gamme moins elle aura un filtre soigné ...

yixing copie ou faux
Photographie © Ebay Inc

A contrario, le fait que le couvercle s'adapte parfaitement et soit donc " étanche " n'est en aucun cas un signe de qualité ... c'est juste le signe qu'un gabarit a été utilisé ou que l'ouverture et le couvercle ont été moulés ... Une excellente théière que je possède a ainsi un couvercle qui se balade largement et qui fuit légèrement suivant la position dans laquelle on tourne le-dit couvercle ... elle aurait été fabriquée vers la fin des années 80 par un sous-traitant de la fameuse "Usine n° 1" selon des critères de qualité un peu plus "lâches" mais fait bien son travail et est faite dans une excellente terre :

gongfucha

Tous les points énumérés ci-dessus ne sont pas graves en eux-mêmes, ils n'empêchent pas d'utiliser la théière, ni ne mettent l'utilisateur en danger. Il sont justes révélateur d'une production de série et plus ces défauts s'accumulent sur une même théière, plus ils sont le signe d'une mauvaise qualité de terre. Ainsi, plutôt que d'acquérir ce genre d'article, on économisera quelques sous supplémentaires pour acquérir une théière de milieu de gamme, qui ne coûtera pas beaucoup plus cher, mais qui sera largement meilleure. Sinon, si l'envie de se lancer dans l'achat d'une théière n'est pas prédominante car la théière à avant tout un aspect pratique, l'achat d'un Gaiwan en porcelaine de facture simple offrira toujours un meilleur résultat qu'une théière de Yixing douteuse et sera également moins cher.

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Rentrons maintenant dans les défauts rédhibitoires ... là encore, je serai clair, à mon sens, la présence d'un seul d'entre eux est le signe que l'achat ne doit absolument pas se faire ...

  • La fausse terre de Yixing ou comment faire passer de la terre à pot de fleurs pour de la terre de Yixing :

La terre de Yixing n'est naturellement pas la seule argile dans laquelle on peut faire des théières valables, loin s'en faut, mais c'est certainement le style de théières le plus copié, à cause de l'engouement suscité par cet objet chez les buveurs de thé en général et chinois en particulier. De plus, de longue date en Chine, une personne instruite et de qualité se doit de posséder et d'étudier des objets du passé, qui plus est si elle a de l'argent ... les anciennes théières de Yixing étant de ces objets à contempler ... le tout explique finalement la flambée des prix de ces théières, simplement par la hausse du nombre de chinois pouvant se payer de tels objets ...

Naturellement, tout ce qui est cher et prisé par les collectionneurs est copié ... Mais les faux grossiers sont assez faciles à repérer, parce qu'ils ne sont pas destinés à des collectionneurs éclairés, mais à des personnes qui n'y connaissent rien, pensant que tous les produits se valent, et cherchent avant tout " une bonne affaire " ...

gongfucha
Photographie © Ebay Inc

gong fu cha
Photographie © Ebay Inc

La terre, qui n'est pas une terre de Yixing, est donc littéralement camouflée sous une couverte légère qui vise à cacher une couleur trop pâle et une texture trop lisse. La plupart du temps, ce type de camouflage ne tient pas devant un examen simple qui consiste à soulever le couvercle et à regarder l'intérieur ou à la retourner et chercher les points de frottement où la couverte ne peut se fixer, comme les endroits où la théière est posée lors de sa cuisson, notamment le dessous. La couverte est parfois même si mal posée, qu'il est difficile de passer à côté d'un travail aussi bâclé.

gongfucha
Photographie © Ebay Inc
gongfucha
Photographie © Ebay Inc

Pour l'anecdote, les deux exemples ci-dessus sont également pourvus de rehauts de couleurs douteux qui semblent être des décalcomanies / transferts. Ces théières semblent également avoir été artificiellement vieillies par une application de vieille huile ( au choix, vieille huile de friture rance, huile de vidange usagée, goudron liquide, ... tant que c'est sombre, graisseux et que cela laisse une teinte sombre après le passage d'un chiffon pour enlever le surplus, c'est utilisable ... de toute façon, pour le goût dans votre tasse, le vendeur n'est plus concerné ... ) qui donne cette patine un peu sombre, comme si la théière avait connu de nombreuses infusions sur une longue période ( raison pour laquelle il s'agit aussi d'une technique répandue chez les faussaires vendant de fausses céramiques "antiques" ).

Il existe aussi des fausses théières de Yixing, comme celle ci-dessous, réalisées dans une terre médiocre qui va légèrement se vitrifier un peu plus à l'extérieur qu'à l'intérieur lors de la cuisson car la terre utilisée n'est clairement pas adaptée à la réalisation de céramiques, du moins pas de telles céramiques ... puisque c'est réellement de la terre à pots de fleurs ... Il arrive fréquemment qu'une telle théière se craquelle à certains endroits lors de l'utilisation car l'extérieur est plus vitrifié, donc plus rigide, que l'intérieur qui est resté un peu plus "mou" ... cette différence engendre les craquelures du fait de réactivités différentes lors des dilatations et des contractions. La théière semble alors percée ou fissurée de part en part, mais il n'en est rien car la fine couche extérieure est seule touchée.

mauvaise terre de yixing

  • La teinte dans la masse ou comment faire passer de la terre courante pour de la terre Zhuni :
  
Certains modèles, avec une teinte dans la masse, donc où l'on a teinté la totalité de la terre utilisée et non plus seulement sa surface, sont plus difficile à détecter pour celui qui n'a jamais vu une vraie théière de Yixing. Difficulté supplémentaire, les théières bas de gamme fabriquées réellement à Yixing en grande série utilisent également ce type de terre.

gongfucha
Photographie © Jiangtea Ltd

La terre est ici entièrement teintée artificiellement. C'est le type de modèle de théière de Yixing bas de gamme le plus difficile à détecter sans expérience. On pourra cependant se fier à des détails techniques, comme l'anse grossièrement exécutée et sans aucune finesse ... un bon indice également est généralement le rehaut en couleur de la gravure, pour rendre la théière plus attractive, et sur lequel nous reviendrons par la suite.

Toutes les teintes dans la masse ne sont cependant pas mauvaises et toutes les théières de couleur entièrement teintées dans la masse ne sont pas synonyme de mauvaise qualité, à condition que la mise en couleur se fasse avec une argile qui soit d'une qualité suffisante. L'emploi de la couleur sert alors à créer un effet artistique, sans se faire au détriment de la qualité et n'est pas un moyen de masquer la médiocrité.

terre de yixing colorée

Ici, l'emploi de la couleur répond à certains critères : teinte complète ou ajout de morceaux de décors entièrement teintés sur une théière d'une autre teinte. Pour l’achat de ce dernier type de théière, il vaut mieux avoir le modèle dans la main pour juger de la qualité de la terre, car l'inspection d'une photographie ne suffira généralement pas ... et ne pas oublier que plus il y a de couleurs, plus il faut ouvrir l’œil.

théière pour gong fu cha
Photographie © Ebay Inc

Par exemple, pour les théières présentant un "damassage" de mêmes terres teintées dans la masse par différents oxydes, un motif très semblable doit pouvoir se retrouver tant sur la paroi interne de la théière que sur la paroi externe, comme on peut le voir ici sur le couvercle.
 
  • Le rehaut de couleur :

Une fine gravure avec un beau motif ou une belle calligraphie est sans conteste un élément apportant un charme supplémentaire, même lorsqu’il s'agit seulement de "gravures" réalisées par empreintes de tampons. Mais cela peut également constituer un problème potentiel quand des couleurs artificielles sont employées ...

gong fu cha

gongfucha

Une gravure est normalement de la même couleur que la terre, quelle que soit cette terre, comme sur les exemples ci-dessus, pour les cuissons à "faible" température. Pour les cuissons à une température plus élevée, les gravures ressortent plus claires car la vitrification est plus importante. Le fait de graver cette surface va donc "casser" cette vitrification et la lumière va se refléter différemment ... en règle générale, si l'on passe de l'eau sur cette gravure, l'effet de blancheur va s'estomper et retrouver une certaine unité de couleur proche de celle du reste du corps de la théière. Si la couleur ne change pas, c'est qu'il s'agit d'une couleur appliquée ... naturellement, la plupart du temps, impossible de s'en rendre compte tant qu'on n'a pas mouillé la-dite gravure, ce qui complique les achats sur le net ...

Gong Fu Cha thé et céramique

Si une couleur est utilisée, voire deux, c'est qu'elles sont artificielles, dans l'immense majorité au sens négatif du terme car il est rare que cela soit un vrai émail posé après gravure et recuit ...

Après gravure, un ouvrier est alors payé pour passer un ou deux coups de pinceaux et d'encres indélébiles ... on voit même des théières où l'ouvrier n'a pas pris la peine d'essuyer les bavures ou les taches de manipulation faites avec des doigts pleins d'encre, et d'autres où l'encrage ne tient pas ... Même si la couleur la plus fréquemment utilisée est le noir, les marqueurs indélébiles de toutes couleurs sont également souvent employés ... et pour ce qui est du prix, cette technique ne le renchérit même pas vu les bas coûts de main d’œuvre et le prix dérisoire des fournitures nécessaires ... petit florilège :

théière de yixing bas de gamme
Photographie © Jiangtea Ltd
théière de yixing avec gravure coloriée au marqueur
Photographie © Jiangtea Ltd

théière polluée
Photographie © Jiangtea Ltd

Si la remarque est valable pour les théières passées au noir ou au rouge, elle l'est encore plus pour les rehauts "à l'or", très à la mode en Chine. Il ne s'agit bien sûr pas de feuille d'or, car trop cher ( au cours du marché de ce jour, le gramme d'or est à 30,30 € ), et encore moins d'une couverte à l'or, car cette dernière technique nécessiterait une deuxième cuisson, ce qui entrainerait trop de pertes ...

théière avec filet d'or de décoration
Photographie © Jiangtea Ltd
Naturellement, cela s'applique également à la mode des théières de Yixing "à fleurs", que la théière en soit entièrement couverte ou pas ... dans le meilleur des cas, ce ne sera qu'une glaçure ( qui donnera par ailleurs un petit côté brillant dû à la vitrification ), c'est à dire un vrai émail, fait à la main ou posé par décalcomanie ... dans le pire des cas, ce sera un émail dit " à froid ", en réalité des résines et des résines époxy qui contrefont très bien un décor sur couverte, du moins tant que l'on ne voit l'objet qu'en photographie de qualité moyenne.

copie de théière de yixing
Photographie © Ebay Inc

copie de théière de yixing
Photographie © Ebay Inc

Pour conclure, le meilleur moyen de ne pas se tromper est de ne pas se précipiter, de prendre le temps de la réflexion sur l'usage auquel on destine la théière, de comparer le plus longuement possible - y compris dans des boutiques physiques si on le peut - le plus de théières possibles, de prendre un ou des avis extérieurs de personnes qui ne seront pas impliquées, de ne pas se focaliser seulement sur le prix que l'on veut y mettre ou sur le prix auquel on estime l'objet et surtout d'observer longuement la théière retenue à la recherche de défauts ... car le bon sens allié à un peu d'éclairage technique restera votre meilleur allié.

7 novembre 2014

Porosité(s) et effet(s)

Arita porcelaine ko sometsuke

Le choix d'un instrument pour le thé peut se faire pour de multiples raisons. Il peut y avoir la recherche esthétique, celle d'une forme particulière ou encore, et c'est celle qui va être abordée ici, celle d'un effet particulier sur le thé. Pour ce point particulier il faut, à mon sens, prendre avant tout en considération la porosité de la matière utilisée, qui sera d'une grande influence.

On vante parfois la supériorité de la porcelaine sur les autres types de terre ... De fait, c'est une pratique fort ancienne, qui semble remonter aux débuts de la commercialisation de la porcelaine elle-même, pour une raison à priori fort simple : ses qualités esthétiques et sa capacité à accrocher la lumière, mais aussi sa relative nouveauté lors de son introduction en Europe et enfin, sa supériorité technique par rapport aux autres types de céramique.

La porcelaine présente, en effet, la caractéristique d'être la moins poreuse des céramiques, raison pour laquelle elle permet de réaliser des instruments pour le thé qui n'en modifieront pas le goût ... du moins en théorie ...

... car l'affirmation doit être quelque peu nuancée. Tout d'abord, la porcelaine non frittée, également parfois appelée biscuit, et qui n'est donc pas recouverte d'une couche cristalline translucide semblable au verre est poreuse et s'il elle est en plus insuffisamment cuite, elle est tout aussi poreuse que n'importe quelle céramique. Cet aspect est assez facile à constater, les parties non frittées d'une porcelaine se teintant facilement au contact du thé.

base de théière en porcelaine non frittée

De la même manière, les porcelaines avec un décor sur couverte, risquent également de se révéler faiblement poreuses, du fait des caractéristiques héritées de leur processus de production ( en particulier les multiples traces de manufacturation ), les émaux sur couverte étant cuit à des températures moins élevées.

thé et céramique

Ainsi, des porcelaines récentes issues d'un processus de fabrication maîtrisé devraient se révéler moins poreuses que d'anciennes pièces, d'où la relative absence de besoin absolument nécessaire de posséder des pièces de porcelaine ancienne ... du moins sur un strict plan technique ... Quoi qu'il en soit, ces pièces seront toujours plus poreuses que le verre et, toujours en restant sur le plan strictement technique, celui qui recherche avant toute chose l'absence complète de modification des arômes du thé par son contenant devra en faire sa priorité. Les instruments en verre possèdent en outre la particularité d'être relativement moins onéreux que leurs homologues de céramique, ce qui ne pourra que ravir le néophyte peu équipé qui commence son cheminement sur la voie du thé ...

thé et céramique

En fonction des porosités et des effets possibles, on obtiendrait donc le classement suivant, du moins poreux au plus poreux ( et donc de l'ustensile le plus neutre dans le rendu de la liqueur à l'ustensile le moins neutre dans ce même rendu ) : verre, porcelaine récente, porcelaine ancienne, grès avec couverte, grès sans couverte, terre cuite ... La terre cuite présentant peu d'intérêt du fait de ses faibles capacités en matière de perméabilité, elle n'est plus utilisée pour fabriquer des récipients destiné à autre chose qu'à contenir des plantes ... et encore, pour l'extérieur seulement ... reste à aborder le cas du grès, ou plutôt des grès, car il y a là quelques variantes qui méritent d'être prises en considération.

thé et céramique

Le grès est la famille de céramique qui est peut être la plus large ... quelques centaines de degrés Celsius seulement séparent ces trois pièces mais cet écart va jouer un rôle important. Car entre un grès cuit aux environs de 750° Celsius et un grès cuit à 1250° Celsius, on peut constater quelques différences de porosité qui seront donc susceptibles de jouer sur le rendu d'une liqueur. Une cuisson en Raku donnera un résultat très poreux, et un grès cuit dans la zone de température basse sera plus poreux qu'un grès cuit dans la zone de température haute. Ainsi, les grès du style de Bizen ou de Karatsu seront moins poreux que d'autres, tels ceux de Hagi, qui le seront à leur tour moins ( du fait de leur couverte ) que les grès à moindre température de cuisson. Les couvertes jouent, en effet, ici, un rôle important, qui ne se limite pas seulement à un aspect esthétique ou décoratif. Si l'on a cherché à appliquer des glaçures sur les céramiques, c'est également car ces glaçures renforcent l'imperméabilité immédiate des pièces ainsi réalisées.

Au final, plus la température de cuisson sera élevée, plus la vitrification, suivant la terre utilisée, sera complète et moins le résultat final sera poreux et le rendu dans la tasse proche du thé seul ... et à ce jeu, les instruments de verre et, dans une moindre mesure, ceux de porcelaine, sont imbattables.

Mais porosité n'est pas non plus synonyme de qualité inférieure. L'utilisation d'instruments poreux entraine simplement d'autres résultats dans la tasse que ceux engendrés par les produits vitrifiés, il suffit d'en avoir conscience et de faire des choix en conséquence ... pourquoi des choix ? Parce que si les types de terre vont jouer un rôle, c'est l'art du potier qui va jouer le plus grand rôle et il y aurait presque un effet par théière ...

terre de yixing

Car suivant l'architecture de cette dernière, le résultat va être différent. Le contact de la liqueur avec la terre étant relativement bref, les interactions sont donc limitées ... pour renforcer celles-ci, l'habileté du potier entre en jeu ... c'est ce qui explique que certaines théières soient plus ou moins fines, aient ou non des couvercles aux bords surdimensionnés ou encore soient munies de fines striures en leur cœur qui ne sont pas seulement le résultat d'un éventuel affinage des parois, mais aussi un moyen de maximiser les surfaces de contact entre la liqueur et la terre ... et conduit également à de grands débats autour du culottage ...

théière en terre épuisée de yixing

Quoi qu'il en soit, que l'on préfère la "fidélité" de la vitrification ou l'"alchimie" de la terre, le choix est aussi vaste que le nombre de chemins sur la voie du thé, chacun doit suivre le sien, en suivant ses envies ...

26 octobre 2014

Yuzamashi

boite chinoise ancienne

Voici un accessoire pour la préparation du thé typiquement japonais. Il ne sert qu'à une seule chose : refroidir l'eau sortant bouillante de la Tetsubin ( donc dans les 95° Celsius ) pour lui faire atteindre les températures plus faibles utilisées pour l'infusion des thés japonais ( 60° Celsius à 75° Celsius en général ). Cette eau refroidie est ensuite versée dans le Kyusu pour l'infusion du thé, le thé une fois infusé n'étant pas reversé dans le Yuzamashi mais directement dans des tasses.

Pour connaitre la température atteinte par l'eau après  avoir directement versé l'eau dans le Yuzamashi, mieux vaut, au cours des premières utilisations et si l'on veut connaitre précisément le refroidissement atteint, utiliser un thermomètre car chaque ustensile va réagir différemment et donner sa gamme de température - je parle de " gamme " car il peut y avoir de micro-différences -, contrairement à ce que l'on peut parfois lire à droite et à gauche.

Le processus de refroidissement, lui, est par contre très simple. Il suffit de verser l'eau bouillante dans le Yuzamashi pour que le contact avec la terre, plus froide que l'eau, absorbe une partie de cette chaleur et fasse donc baisser celle de l'eau ...
 
Yuzamashi

En conséquence, cela veut aussi dire que le Yuzamashi va monter en température et que, dès lors, sa prise en main risque d'être problématique en fonction de sa forme, sa structure et de l'épaisseur de ses parois ... Plus un Yuzamashi sera fin, plus ses parois absorberont rapidement la chaleur et plus il la dissipera également plus rapidement tout en étant par conséquent difficile à prendre en main. Un Yuzamashi avec des parois épaisses aura tendance à refroidir l'eau rapidement après la verse, mais dissipera relativement moins bien la chaleur ensuite.

Yuzamashi

Naturellement, il existe toutes tailles et toutes formes de Yuzamashi, car il existe toutes formes et toutes tailles de Kyusu et de Tetsubin ... On se laissera donc guider par l'envie du moment ou par la matière pour faire son choix si l'on veut en acquérir un ... Ou on peut se concentrer sur deux ou trois aspects techniques destinés à faciliter la vie de l'utilisateur en facilitant la prise en main de l'instrument ... ou au moins destinés à réduire les risques de brûlures ...

Des bords hauts relativement marqués et courbés :

Yuzamashi Hagi yaki

Des bords hauts plus épais :

céramique japonaise japanese ceramic

Des "pastilles" de céramique de toutes tailles sur les côtés :

ustensile pour le thé du japon

Bien entendu, tous ces aménagements fonctionnent plus ou moins bien selon les cas, des pastilles de céramique bien proéminentes et des bords hauts taux aussi proéminents étant les aménagements les plus efficaces pour se prémunir contre les effets d'un eau très chaude ...

A l'origine, le Yuzamashi était un instrument indispensable pour la préparation du Sencha, car n'oublions pas que l'eau courante au robinet qui plus est exempte de bactéries néfastes pour l'être humain est une invention relativement récente dans l'histoire de l'humanité ... Aujourd'hui, avec les bouilloires électriques réglables à la dizaine de degrés près, quand ce n'est pas au degré près, et à l'absence de nécessité de faire bouillir l'eau quelques minutes avant de pouvoir la consommer, cet accessoire a donc perdu de son utilité en tant qu'ustensile de refroidissement. Il peut cependant servir de récipient pour "égaliser" une infusion avant de la répartir dans différentes tasses, ou encore, dans le cas des thés du Japon en particulier, mais aussi de tout thé charriant un certain nombre de débris, servir à "décanter", comme un filtre, les morceaux de feuilles plus ou moins importants ... pour ce dernier emploi, la forme en " creuset ", en photographie directement ci-dessus, qui fonctionne parfaitement pour cet usage.

Hagi, Bizen, Arita, Tetsuaki Nakao, Yamane Seigan, Shibuya Deishi, ancienne boite chinoise, antiquité chinoise, boite chinoise ancienne, meuble chinois ancien