DemysTEAfication

20 janvier 2012

Un monument méconnu : Le Cha Jing ou classique du thé de Lu Yu

Ma version  du Le Cha Jing ou classique du thé par Lu Yu, a été publiée aux éditions Jean-Claude Gawsewitch en 2004. La traduction du Chinois classique a été faite par Véronique Chevaleyre.

Lu Yu

Cet ouvrage, aurait été rédigé entre 760 et 780 et serait le premier ouvrage consacré au thé ou du moins le plus ancien qui soit parvenu jusqu’à nous. Bien que beaucoup de monde parle de cet ouvrage, les quelques relations que j’ai pu en trouver  ne semblent pas vraiment avoir saisi la part due à Lu Yu et la part due à d’autres auteurs, car les morceaux de textes cités que j’ai pu trouver deci delà sur le net sont des extraits des passages d’autres auteurs compilés par Lu Yu dans son propre ouvrage.

L’ouvrage de Lu Yu est peu utile au buveur de thé actuel, car trop daté et trop emprunt d’ésotérisme et de croyances ou superstitions diverses par moments, mais il nous renseigne cependant sur les modes de consommation du thé à son époque, qui varient parfois totalement des nôtres, comme le fait de ne pas utiliser alors de porcelaine blanche pour boire le thé. A contrario, le point numéro 5, par contre peut se révéler utile et nous montre que dans quelques domaines qui y sont abordés, les goûts n’ont que peu, voire pas, évolués. L’ouvrage n’en reste pas moins étonnant par moments et se lit aisément.

Mais parlons maintenant de l’ouvrage en lui-même. Lu Yu commence par un préambule où il décrit le but de son ouvrage, à savoir «  décrire […] tout ce qui touche au thé, des Zhou jusqu’à aujourd’hui », puis où il fait une sorte de sommaire de son ouvrage et où il souligne les points les plus importants de son ouvrage, à savoir « l’origine du thé, la façon de la fabriquer, de disposer des récipients,les techniques de préparation ainsi que les effets sur la santé », comme la faculté de guérir la lèpre. Il regrette enfin de ne pas avoir pu mettre son texte sous forme de poème ( Fu ), sorte de façon de s’excuser par avance de ne pas coller à un canon d’écriture alors en vogue.

Volume premier :

1 : Les origines

Ici, l’auteur parle de l’étymologie du mot thé et les caractères employés selon telle ou telle source plus ancienne. Viens ensuite la mention de toutes les appellations du thé en fonction de ses origines géographique et des périodes de récolte. Lu Yu établit ensuite une hiérarchie des meilleurs sols de culture : tout d’abord les sols rocheux, puis les sols de graviers et enfin les sols argileux, les moins bons. Selon lui, la culture des théiers se fait par transplantation et les théiers sauvages donnent de meilleures feuilles que les théiers cultivés et il déclare qu’il faut attendre trois ans après la plantation pour faire la première récolte et que seuls les thés de montagne qui poussent sur l’adret ( côté le plus ensoleillé ) sont consommables. Lu Yu fait ensuite une différenciation des feuilles, les feuilles dites « pousses de bambou » ( les bourgeons je suppose ) étant meilleures que les feuilles « en crocs » et les feuilles roulées meilleures que les plates. La médecine chinoise et l’équilibrage des humeurs reste cependant présente, et l’on apprends que le thé qui pousse dans une vallée ou sur l’ubac ( côté le moins ensoleillé ) d’une montagne ne devra pas être cueilli car « le breuvage obtenu provoquera, en raison de sa nature gelante, la formation de masses dans l’abdomen ».
Il faut également être soigné pour la récolte, la faire au bon moment et ne pas mélanger de mauvaises herbes au thé ce qui est nocif pour la santé. L’auteur insiste sur ce sujet ce qui nous laisse supposer que le problème de mauvaises herbes dans le thé devait être un problème récurrent, et fait un parallèle avec le ginseng, dangereux si de mauvaise qualité, donnant une « idée de la nocivité du thé lorsqu’il n’est pas bon ».

tea addict
Voici une feuille portant les-dits "crocs"

2 : Les ustensiles du traitement des feuilles

L’auteur donne ici les différents noms des paniers à thé ( nom principal : Ying, subdivisions : Lan, Long ou Ju ), puis dresse une liste et une description des autres ustensiles : fourneau ( Du ) à cuire le thé à la vapeur, étuveur ( Zeng ), ainsi que la méthode pour l’utiliser, pilon ( Chu ) pour le broyage, moule en fer ( Gui ou Mo ou encore Quan ) de forme carrée, ronde ou en fleur, du socle ( Cheng ou Tai ) en pierre ou en bois et qui sert de support, du linge ( Yi ou Chan ) pour le pressage, du treillis ( Bili ) pour le séchage et enfin du couteau à piquer ( Qi ) pour perforer les galettes et les placer sur le fouet ( Pu ou Bian, à priori, bâton en bambou où l’on accumule les galettes – comme pour une brochette – ), la fosse de séchage, les liens ( Guan ) pour le séchage et la tonnelle ( Peng ou Zhan ) qui recouvre la fosse, la corde à thé ( Chuan ) et la réserve ( Yu ).

3 : La cueillette

Après l’évocation de l’aspect technique, on l’auteur parle des périodes de récolte, des diversités des types de galettes de thés et de leur aspect, des meilleures au moins bonnes. Là encore, les croyances semblent fortement présentes, les galettes faites la nuit devenant noires et celles faites la journée tirant vers le jaune, à moins que ne soient ici éclairées les lacunes de Lu Yu sur la torréfaction des galettes ou non ?
Nous pouvons cependant en déduire qu’il existait deux types de galettes de thé : les noires ( cuites ? ) et les jaunes ( crues ? ). Quoi qu’il en soit, ce passage illustre la difficulté de comprendre ce que veut exactement dire Lu Yu du fait du manque de détails suffisamment descriptifs.

Volume deuxième :

4 : Les ustensiles de la préparation du thé

Nous avons ici encore une énumération et une description succincte d’ustensiles divers pour préparer le thé bouilli, méthode de préparation en vogue alors. Il y a ainsi le four tripode ( Fenglu ) ou four à vent pour faire bouillir l’eau, la corbeille ( Ju ), le maillet à charbon ( Tanzha ) , les pinces à feu ( Huoce ) pour saisir les braises, la marmite en fonte ( Fu ) ou autres matières, le pose marmite ( Jiaochuang ) et les pinces ( Jia ) pour la cuisson des galettes, la meule ( Nian ) et le plumeau pour ramasser la poudre de thé, qui est passée dans un tamis ( Luo ), mise dans un coffret ( He ) rond en bois ou en bambou avec une cuiller ( Ze ) spéciale. Viennent ensuite le filtre ( Lushuinang ) et sa poche de toile cirée pour son rangement, la calebasse ( Piao ou Xishuo ) réserve à eau, le pot à sel ( Luogui ) rond et en porcelaine, la jauge à sel ( Jie ), le pot à eau chaude ( Shuyu ) en porcelaine ou en poterie et les bols ( Wan ).
Ici, une longue digression est faite sur les bols et la classification des porcelaines en fonction des lieux de production, de la meilleure, en haut du tableau, à la moins bonne :


Ancienne dénomination
Dénomination actuelle
Province actuelle
Type de porcelaine
Yuezhou
Shaoxing
Zhejiang
bleue
Dingzhou
Jingyang
Shaanxi
( bleue ? )
Wuzhou
Jinhua
Zhejiang
( bleue ? )
Yuezhou
Yueyang
Hunan
( bleue ? )
Shouzhou
Ville disparue
Anhui
jaune
Hingzhou
Nanchang
Jiangxi
brune
Xingzhou
Xingtai
Hebei
blanche


Lu Yu attache une attention particulière à la couleur que donne chaque type de porcelaine au thé :
Bleu : le thé rosit
Jaune : le thé vire au pourpre
Brune : le thé devient noir
Blanche : le thé devient rouge

L’auteur insiste lourdement en peu de temps dans le texte ( signe d’une très grande importance donc ) sur le fait que la meilleure couleur de bol est le bleu et qu’il ne faut pas se servir des porcelaines jaunes, brunes et blanches pour boire le thé ! Les bols sont peu profonds, avec des bords évasés

L’énumération continue ensuite avec le panier à bols ( Ben ), la brosse ( Zha ), la cuvette de rinçage ( Difang ) où est conservée l’eau qui a lavé les feuilles, le torchon ( Jin ) en tissu grossier pour essuyer les ustensiles, la desserte ( Julie ) qui est un meuble à étagères et la corbeille pour le service ( Dulan ).

Volume troisième :

5 : La préparation

La torréfaction du thé en galettes est expliquée par le menu : « il faut veiller à ne pas le faire au-dessus de braises exposées au vent » car le thé serait chauffé de manière non uniforme. Il faut approcher les galettes du feu et les tourner sans cesse jusqu’à l’apparition de petites aspérités ; on continue alors à rôtir les galettes à la flamme mais à une distance de 15 cm.

Selon Lu Yu, le charbon de bois est le meilleur combustible et préférable à un feu vif de bois de chauffage. Mais « si les charbons ont servi à faire cuire de la viande et qu’ils en ont gardé l’odeur, qu’ils ont reçu de la graisse de cuisson ou s’ils proviennent de bois huileux, sur lesquels a coulé de l’huile, ou d’ustensiles en bois abîmés », ils sont impropres à la préparation du thé car ils risqueraient d’en fausser le goût.

Le point capital de l’eau suit : « l’eau de source provenant des montagnes est la meilleure, vient ensuite l’eau des fleuves et enfin, l’eau des puits, la moins bonne ». La meilleure eau serait d’ailleurs celle des rivières de la montagne Min ( Min Shan, montagne au nord de Songpan, dans le Sichuan ). Mais là encore, les considérations ésotériques prennent une place importante car «  pour faire bouillir le thé, les meilleures de toutes les eaux sont celles qui ruissellent doucement sur des lits de roches » car « il ne faut pas boire l’eau qui jaillit avec violence dans les torrents ou les cascades » du fait qu’une « consommation prolongée peut entraîner des maladies au cou ». Pareillement, il ne faut pas consommer, dans l’eau des « rivières qui coulent au creux des vallées » celle venant des « poches d’eau où le courant ne circule pas [ car ] toutes sortes de dragons cachés peuvent s’y accumuler et les empoisonner ».

Il y a aussi des conseils de bon sens, comme pour l’eau des fleuves, qu’il faut aller « puiser loin des zones habitées » et « pour l’eau des puits, il faut la prendre là où tout le monde le fait ».

L’auteur parle ensuite des trois stades d’ébullition ( premier : petite bulles en yeux de poissons et son léger, deuxième : perles amassées sur le bords, troisième : l’eau moutonne ) et précise bien que « si l’on continue à chauffer, l’eau n’est plus propre à la consommation » ( Nous savons de nos jours qu’il y a disparition progressive de l’oxygène dans l’eau, ce que les anciens dont Lu Yu ne savaient pas, mais qu’ils avaient compris avec le seul goût de l’eau visiblement ! ).

L’auteur précise que le sel est ajouté au début, suivant la quantité d’eau. Il décrit ensuite la marche à suivre pour faire un thé bouilli : « A la deuxième ébullition, retirez une calebasse d’eau de la marmite et touillez avec la cuiller de bambou. Versez au milieu, au cœur du tourbillon [ ainsi créé ], une mesure de poudre [ de thé ]. Vient un moment où l’ébullition est si forte que les vagues formées par l’eau déferlent ; la vapeur s’élève en gros nuages. Alors renversez dans la casserole [ le contenu de ] la calebasse d’eau que vous aviez puisée au début. Ainsi l’ébullition s’arrêtera tout en préservant l’écume à la surface ».
Il y a trois noms pour la mousse sur le thé : Mo ( peu épaisse ), Bo ( épaisse ) et Hua ( fine et légère ). Il y aurait trois noms pour le thé : Jia ( légèrement sucré par nature ), Chuan ( amer ) et Cha ( amer en bouche puis qui s’adoucit dans la gorge ).

6 : La dégustation

Il s’agit ici de l’histoire du thé en tant que breuvage, qui remonterait à l’empereur légendaire Shennong, qui serait l’inventeur de l’agriculture et qui aurait régné de 2737 à 2697 avant notre ère.
Lu Yu cite ensuite les condiments qui peuvent être ajoutés : ciboule, gingembre, jujubes, zeste de mandarines, clavalier et menthe poivrée, mais n’en pense pas du bien et est contre ces ajouts.

7 : Histoire du thé

Ici, l’auteur recense d’abord toutes les personnes qui ont traité du thé par le passé et dresse l’inventaire des ouvrages anciens qui ont fait de même. Lu Yu cite toutes sortes d’ouvrages, du dictionnaire au récit fantastique. Il mentionne de fait tous les ouvrages qui ne font ne serait-ce qu’une mention succincte du thé. Il nomme donc à la fois ses sources et réalise ici un travail de compilateur, dans un style cher à son époque. Lu Yu s’inscrit ainsi dans la lignée de ses prédécesseurs tout en justifiant par là, la légitimité de son travail.

8 : Lieux de production

Lu Yu réalise ici une classement de la valeur des thés suivant leur lieux précis de production, par région, sans faire de hiérarchie cependant entre les différentes régions mentionnées.

9 : Peut-on se passer des ustensiles ?

Le fouet de bambou, la fosse de séchage, les liens, le panier, la corde à thé et la réserve ne sont pas indispensables. Par contre, les bols, les pinces, la brosse, le pot à eau chaude et le pot à sel sont essentiels. On peut également s’adapter en fonction des ustensiles que ramènent les personnes conviées à prendre le thé. Mais au final, tout dépend de la situation dans laquelle on se trouve et qui prends le thé avec son préparateur, car « aux portes de la demeure royale, si sur les vingt-quatre objets du thé un seul manque, le thé est superflu ».

10 : Illustrations

En guise d’épilogue, Lu Yu invite à recopier son texte, ce qui est un moyen de l’inscrire dans la lignée des grands classiques.

16 janvier 2012

Chashaku : un monde infini

Le terme de chashaku désigne la cuillère utilisée pour doser le matcha. Comme toujours, tout serait simple si nous nous arrêtions là, mais c’est ici que se fait remarquer la multiplicité des formes et des matières et ses significations.

En premier lieu, on peut retenir trois dénominations ou " types " :
  • Shin chashaku
  • Gyo chashaku
  • So chashaku
Pour le type shin, on peut utiliser de l'ivoire, de l'écaille de tortue ou  du bambou, mais sans noeud. Pour le type gyo, on n'utilise que du bambou, avec le noeud placé à la fin du manche. Enfin, le type so chashaku, on peut utiliser une application de laque, du bois brut ou du bambou, mais avec le noeud au milieu du manche.

Pour compliquer encore les choses, chaque type à sa " valeur ", suivant le sens que l'on veut donner à la séance de thé ou suivant les relations entre l'hôte et le ou les invités :
  • Shin : séance formelle
  • Gyo : séance semi formelle
  • So : séance informelle
A partir de là, chaque chashaku peut être la combinaison de multiples formes lors de la procédure de taille : longueur, utilisation des stries naturelles du bambou ou non, forme donnée au bout servant de cuillère, forme donnée au bout servant de manche, forme de taille de la fin du manche ( allant, pour faire vraiment court, de l'arrondi au rectangle ) avec ou sans biseautage, ...

Mais ce n'est pas fini ... vient encore la couleur donnée au bambou, qui multiplie encore les combinaisons possibles, mais en images cette fois-ci, qui parlent d'ailleurs d'elles-mêmes :

Susudake :

Susudake chashaku
Avant foncé

dos de chashaku
Arrière clair
  Shirodake :

chashaku
Avant clair

dos de chashaku
Arrière clair
 Shi mi dake :

chashaku
Avant foncé tirant vers le clair

dos de chashaku
Arrière foncé ou " caramel "
Comme vous l'avez sûrement remarqué par ailleurs, ces trois modèles sont du type So chashaku, du fait de la position du noeud du bambou au milieu du manche.

Arrivé ici, il est simple de constater les multiplicités de formes de ce qui n'est au premier abord qu'une cuillère à doser le matcha ...

... mais c'est ici que tout se complique avec l'arrivée du décor en laque, puits sans fond, porte ouverte sur l'imagination des créateurs ... et ce qui suit n'en est même pas un aperçu, les couleurs de laque utilisées étant nombreuses, tout comme les motifs et leurs emplacements :

ornementation à la laque sur cuillères à matcha

cuillère à matcha

cuillère à matcha

chashaku

15 janvier 2012

Comme une odeur de sapin ...

Sapin n.m. (du gaul.). Arbre résineux (conifère) des régions tempérées de l'hémisphère Nord et de l'Amérique centrale, aux feuilles persistantes courtes et insérées régulièrement sur les tiges (ce qui les distingue de celles du pin) ¤ Bois dont on fait les cercueils ¤ Fam. Sentir le sapin : n'avoir plus longtemps à vivre.

L'impression de mon billet précédent s'est trouvée confirmée hier, après un bref passage au 260 boulevard Saint Germain, une des boutique de liquidation de la Compagnie Française de l'Orient et de la Chine. Le "Hermès" du produit chinois brade donc tout, ou du moins tout ce qui lui reste en objets de décoration et en céramique.

Tant pis, car même si je n'aimais pas trop l'ambiance ( due notamment à sa clientèle mal élevée et imbue d'elle-même, preuve que l'argent ne peux pas tout acheter, en particulier l'éducation et la culture ), la C.F.O.C. importait des articles que l'on ne trouvait nulle part ailleurs.

J'invite donc tous ceux qui veulent en profiter à le faire dans les plus brefs délais, car il reste quelques trésors dispersés dans les deux boutiques citées dans mon précédent post.

Pour ma part, je crois y avoir fait mes derniers achats hier :

tasse a thé song

Soit une grande coupe à 17 euros qui me servira de pot poubelle pour le Gong fu cha et deux tasses dans le plus pur style de la céramique de la dynastie des Song du Nord ( 960 - 1127 après J.C. ), à 4 euros pièce.

Le style des Song du Nord s'obtient par l'application de pigments de cuivre sur la glaçure sêche mais non encore cuite, pour obtenir une surface uniforme, avec une glaçure dominante bleue traversée par des nuages violets - rouges

tasse a thé chinoise

Le "pot poubelle" n'est pas en reste, et sa glaçure est d'un blanc-bleu crémeux à la texture légèrement irrégulière, au toucher d'une douceur infinie qui n'est pas sans rappeler celle du style Shino japonais.

compagnie française de l'orient et de la chine

13 janvier 2012

Chronique d'une mort annoncée ?

Fondée en 1966 par François Dautresme, la Compagnie Française de l'Orient et de la Chine  ( http://www.cfoc.fr/ ) vit vraisemblablement ses dernières heures sous sa forme actuelle.

compagnie française de l'orient et de la chine
Photographie © Le journal des vitrines / Stéphanie Moisan

Après avoir mis en vente aux enchères chez Artcurial le 3 mai 2011 une partie de son mobilier en stock, la C.F.O.C. s'était lancé dans une liquidation pour travaux à sa boutique phare du 170 boulevard Haussmann, à Paris. Quelques temps après, une nouvelle liquidation avait lieu au 65 avenue Victor Hugo et au 260 boulevard Saint Germain, toujours à Paris. Cette liquidation se poursuit toujours et on y trouvera jarres, théières de Yixing et théières à couverte, poteries diverses, bols, tasses, coupes, objets de lettrés, objets de décoration, laques, meubles ( les photographies de ce post sont de Stéphanie Moisan. Plus d'images pour se faire une idée de ce que la C.F.O.C. vendait, allez voir l'excellent site-blog de Stéphanie Moisan, dédié à l'art graphique, à l'architecture d'intérieur et à leur application dans cet art de la mise en scène que sont les vitrines de magasins : Le journal des vitrines, ici et ici ), ...

compagnie française de l'orient et de la chine
Photographie © Le journal des vitrines / Stéphanie Moisan

La liquidation s'est pourtant accélérée, les meubles étant aujourd'hui tous soldés à 70 % de leur prix d'origine, et je gage que cette vente touchera bientôt à sa fin. Il est donc temps de profiter de quelques affaires, en particulier pour ceux voulant s'équiper en objets pour le thé. Au temps de sa gloire, j'y avais trouvé une jarre pour stocker mes galettes de Pu Erh. On se rendra donc rapidement dans les deux magasins de la rue Victor Hugo et du boulevard Saint Germain pour pouvoir acheter à bas coût de bonne théières de Yixing ( j'ai acheté chez eux ce que je considère comme une de mes meilleure Yixing ) à des prix fortement soldés ( au minimum 50% du prix d'origine il me semble ).

cfoc
Photographie © Le journal des vitrines / Stéphanie Moisan

J'espères que la nouvelle formule à venir, qui se concentrera dans la boutique rénovée du 170 boulevard Haussmann d'après ce qui m'a été dit, ne perdra pas le charme de l'ancienne C.F.O.C. et qu'elle proposera toujours des objets d'exception car, dans le cas contraire, ce serait tout de même une grande perte pour ceux qui, outre la céramique, aiment l'artisanat chinois de très haute qualité... personnellement, je la regrette déjà ...

11 janvier 2012

Sachets : ce que nous buvions ...

... ou " pourquoi les amateurs de thé ne considèrent pas les sachets comme du thé " ?

Une des raisons qui m'ont donné envie de faire ce blog est une petite phrase entendue par hasard et qui ne m'était pas destinée : " Moi, le thé j'essaie, mais je n'arrive pas à aimer çà, c'est dommage hein ? ". Cette phrase était prononcée par une jeune fille à l'attention d'une de ses amies près du stand tenu par "Les jardins de Gaia"  - http://www.jardinsdegaia.com/  - spécialisés en thé bio et en commerce équitable - sur le salon Japan Expo 2011. Je me suis alors souvenu qu'au même âge je m'étais dit également que " le thé, on en fait une montagne et pourtant cela n'a rien de vraiment formidable ", avant de mettre les pieds, presque par hasard, dans un petit salon de thé où j'ai découvert le thé en vrac et l'art de l'infusion, alors qu'auparavant je ne connaissais que les thés en sachet de supermarché.

Eh oui, inutile de se mentir, nous avons tous bu, au début, du thé en sachet. C'est par là que nous avons certainement tous commencé, ainsi que par des thés plus ou moins abondamment aromatisés ( et comme tous les thés natures, de qualité variables - et là encore, tout le monde en a bu à un moment ou à un autre, inutile de se mentir ). Mais une fois goûté le plus basique des thés natures en vrac ( ceux achetés en comptoir, pas ceux de supermarché, là encore ), impossible de revenir en arrière ( du moins pour moi, et cela même si j'ai bu beaucoup de thé en sachet par le passé ).

Pour voir d'un peu plus près ce que nous buvions ( et que d'autres boivent encore, après tout, selon ma propre philosophie, chacun est libre de faire ce qui lui plaît et, pour paraphraser John Stuart Mill : "La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres" ) , j'ai fait infuser divers sachets "supermarchés" récupérés à droite et à gauche, du premier prix aux "grandes marques" en passant par les marques distributeurs ... Le résultat est encore plus édifiant que ce que je pensais :

Pour la qualité, cela ne dépasse pas le garde de la poussière ( Dust ou grade D, grade le plus bas ) et n'atteint même pas le grade de Fanning ( grade F, un peu au-dessus du grade précédent, mais à peine ) à mon grand étonnement.

Mais comme une bonne illustration vaut plus qu'un long discours :

Les deux premières infusions : premier prix et marque distributeur ( la marque du supermarché ) :

thé en sachet
Premier prix ( à gauche ) et marque distributeur ( à droite )
thé en sachet
Gros plan sur le premier prix !

thé à jetter
La marque distributeur, ce n'est pas mieux ...
Les deux types sont extrêmement proche et tous deux forment une bouillie compacte, un agglomérat de petites poussières et de quelques morceaux à peine plus gros.

Les deux infusions suivantes, deux "grandes marques" :

cochonneries dans le thé en sachet
Les deux se valent, voir ci-dessous pour des plans plus rapprochés. La qualité de la poussière est déjà meilleure ... même si le tout forme encore une bouillie relativement compacte ...

the crado aromatisé

produits chimiques dans le thé en sachet

Conclusion, nous n'avons bien ici que du grade D ( Dust ) et nous n'atteignons même pas le grade F ( Fanning ). Pour mémoire, il s'agit là des deux grades les plus bas que l'on puisse trouver, c'est-à-dire presque du déchet en fait. Tout cela pour un prix moyen allant de 4,50 euros / 100 grammes à 5,70 euros / 100 grammes, soit le prix d'un bon thé aromatisé dans un comptoir. Je dis un bon thé aromatisé, car là est bien le problème : pourquoi s'entêter à boire un thé de qualité plus que médiocre, certes forcément plus facile à se procurer ( il suffit de tendre le bras en grande surface ), mais nécessairement rectifié chimiquement ?

Je m'explique : à moins d'être bio, on trouve des traces de pesticides et de produits chimiques dans tout ce qui est cultivé de nos jours, même le thé, combien même la situation actuelle ne serait plus la même qu'il y a quelques années ( L'UFC Que Choisir avait fait une étude à ce sujet il y a maintenant 10 ans ). Dès lors, pourquoi rajouter encore à cela des agents de saveur en grand nombre, comme cela est d'ailleurs stipulé sur les emballages :

Exemple : thé orange - cannelle de grande marque :

Composition ( je n'invente rien, je reprends juste les mentions au dos de la boite de sachets ):
  • thé ( encore heureux ! 73 % )
  • cannelle ( 20 % )
  • arôme orange ( 6 % )
  • écorces d'orange ( 1 % )
Voilà ... qui n'a jamais oublié oublié un sachet de thé lors de son infusion sans que cela porte pour autant à conséquence sur son goût ? Le rôle des agents de saveur doivent certainement jouer un rôle stabilisateur. Le plus étonnant, c'est qu'on essaie de les cacher aux yeux des consommateurs pour faire un " beau " produit, car dans notre exemple ci-dessus, à quoi sert la faible proportion d'écorces d'orange sinon à faire croire à l'inconscient du consommateur que les 6% d'arômes sont naturels ?

Pour finir, et pour bien comprendre, là encore, la différence entre un thé sachet et un thé en vrac, voici deux dernières illustrations de thé vert, un sachet de grande marque et un vrac d'entrée de gamme de grand comptoir :

the de qualite
Qui est qui ? La réponse ci-dessous !


thé de basse qualité
Sachet à gauche et vrac à droite bien sûr !

Quand l'on sait que plus les brisures sont petites et plus l'infusion est colorée, corsée, astringente voir acide, cela se passe de commentaire ... pour ma part, je n'en buvais plus et n'en boirai plus ... même si sur le plan pratique, on ne fait pas mieux qu'un sachet ( une tasse, une bouilloire qui bout à gros bouillons et hop ! ).Maintenant, peut être devrais-je essayer les sachets de comptoirs, qui semblent de meilleure qualité, mais au vu de leur prix, le vrac est moins cher et ses possibilités illimitées ou presque, contrairement aux sachets de comptoir qui ne reprennent qu'une petite partie de la gamme proposée et qui, contrairement aux sachets de supermarché, requièrent les mêmes degrés d'infusion que leurs frères jumeux restés en pots.

Voilà, je n'ai pas fait ce post pour tirer sur des ambulances ou pour enfoncer des portes ouvertes, mais dans l'esprit de ce blog, très " le Thé pour les Nuls " en souvenir du néophyte dans ce domaine que nous étions tous et que, forcément, j'étais ( et le suis encore ). Je n'ai pour objet que l'exposition de simples faits, vérifiables par tous, sans juger ceux qui continuent à aimer les thés en sachets, mais éventuellement pour pousser ceux qui sont déçus par ces derniers d'essayer d'aller un peu plus loin et d'élargir leur champ de vision ... après tout, peut être y trouveront ils leur bonheur, nature ou aromatisé ?